En Quarantaine : Le remake de Rec !
Le 21/11/2008 à 09:41Par Arnaud Mangin
Ne soyons pas totalement bégueule, En Quarantaine n'est pas un film mauvais. Par ''Pas mauvais'', on entend surtout qu'il peut au moins se permettre d'être aussi bon que l'original puisqu'il en reste désespérément une copie conforme à deux ou trois péripéties ou partis pris près. Les rares innovations de cette relecture étant de toute façon la quintessence du nombrilisme hollywoodien qui insuffle suffisamment de mauvaises idées pour caricaturer, ne serait-ce qu'un peu, le film de Balaguero et Plaza. Pour le reste, En Quarantaine transpire la glandouille à pleines gouttes, n'apporte rien, ne transcende rien et n'essaye rien ! De toute façon, ça s'adresse à n'importe qui, sauf à des cinéphiles, laissant ainsi l'opportunité au spectateur de bon goût de choisir son camp.
Les autres, les ados cultivés en jachères dans l'american way of death, vont kiffer ! C'est huilé ainsi depuis un moment et il n'y a aucune raison que ça change...
Dans les faits, on aimerait bien vous parler en long en large et en travers de En Quarantaine mais, magie du remake, on l'a déjà fait il y a plusieurs mois lorsque l'on vous dressait dans nos colonnes un compte rendu du film original, encore très frais dans les esprits. Au départ, nous voulions nous aussi simplement faire un copier-coller et s'en frotter les mains. Ben oui, pourquoi devrait-on se casser le cul à faire de nouvelles piges pour parler d'un truc qui pue la repompe malveillante. Ce serait comme si l'on encourageait un cancre à copier sur le premier de la classe assis à côté de lui... pas bien. Et puis à bien y regarder, si ça reprend stupidement les grandes idées (visuelles comme narratives) de l'original, il y a un fossé fondamental qui sépare les deux bouts de péloches. Une façon différente de cuisiner la popote. D'un coté celui qui a créé sa recette, de l'autre celui qui n'a fait que noter les ingrédients. Et on sait à quel point les studios américains sont de piètres cuisiniers quand ils ne font pas du local.
Comparons avec ce que nous avions noté en février dernier :
'' Rec. joue à fond la carte du train fantôme au processus identificatoire ultime, il est bon de poser le spectateur dans une situation tout autre que celle d'un film lambda. Une situation où il est directement plongé dans ce fait divers horrifique sans ne jamais rien savoir de plus ou de moins que les héros du film. La vue subjective est donc de rigueur, prolongeant d'ailleurs un peu plus l'atmosphère dans celle d'un jeu vidéo. Jeu vidéo, émission de télé... autant de choses bien familières''
Bon ben ça c'est terminé puisque si dans les faits, ça se déroule de la même façon, Hollywood reste Hollywood et ne peut s'empêcher de faire les choses et déboulant avec ses gros sabots. Tout est là pour nous rappeler justement que l'on est dans un film. Et un gros film qui plus est : Un pompier super courageux et pour qui on ne s'inquiète pas puisque qu'il a déjà zigouillé tous les méchants dans Hostel, accompagné de deux ou trois autres seconds couteaux bien connus (on aura déjà vu le ruskov de service dans 24, Mission Impossible 2, Space CowBoys, Shooter et bien d'autres). Pour le côté document vérité filmant madame tout le monde, on repassera. D'autant plus qu'outre une romance balancée de derrière les fagots où le fameux pompier drague la journaliste pendant l'interminable quart d'heure introductif, le directeur photo à jugé bon d'éclairer tout ça comme s'il s'agissait d'un cinquième Alien. Cool. Comme quoi les vieux immeubles pourris ont parfois d'étonnantes ressources... D'ailleurs venons-en à ce vieil immeuble.
'' ... autant de choses bien familières appuyées par le lieu de l'action situé dans un petit immeuble de centre-ville soudainement transformé en huis clos forcé.''
Les immeubles européens, c'est chouette. C'est l'un des charmes de Rec. Mais l'Europe, c'est vieux... Et puis ils parlent pas tous anglais... Alors bam ! En Quarantaine se déroule à Los Angeles, mais surtout dans un trèèèès vieil immeuble. Le genre qui ferait passer la maison de Norman Bates pour le Palais des Glaces, avec des lustres remplis de toiles d'araignées, des rats qui courent partout et des cas sociaux clandestins à tous les étages. La morale est sauve puisque l'une d'entre-deux se fera balancer du haut des escaliers, offrant une démonstration assez efficace pour déloger les mauvais payeurs, mais bon... Une fois encore, on aura pleinement le temps d'apprécier le pénétrant regard surélevé du cinéma américain sur une culture qui n'est pas la sienne. Tous les gens qui habitent dans un immeuble ne ressemblant pas à l'Empire State Building apprécieront...
Jusque là, ce n'est pas encore très grave puisque l'on peu mettre les première lacunes de En Quarantaine sur le compte de l'ignorance. Si les mecs qui se jettent comme des morts-de-soif sur les droits d'un film pour en faire un remake savaient de quoi ils parlent, ça se saurait... Non, l'autre problème, c'est que le film fonce tête baissée dans des fautes de goûts que Rec avait eu l'intelligence de contourner. Dans cette volonté d'en faire trop, beaucoup trop, et d'étaler grassement ses possibilités techniques sans se demander une seconde si ça sert à quelque chose. Le contaminés sortent désormais tout droit de Evil Dead, ont des vraies têtes de monstres, se déplacent en accéléré ou tombent en morceaux comme des Big Mac putréfiés. A cela viennent s'ajouter des snipers, des hélicoptères qu'on entend trop bruyamment pendant l'intégralité du huis clos et beaucoup d'autres indices révélant que le mec derrière ce truc là n'assume plus du tout l'aspect reportage de son film. L'une de ses plus mauvaises idées étant de reproduire un peu le syndrome Cloverfield avec un gros lourd derrière la caméra qui commente ce qu'il voit et ce qu'il fait, explosant un rat d'un coup de semelle ou pire, défonçant carrément la tête d'un zombie avec l'objectif de la caméra.
Le coup de boule en vue subjective, j'en ai rêvé, Sony l'a fait. Mais ne l'a pas très bien fait. Ou en tout cas avec un désintérêt absolu. En Quarantaine, sans être une plus mauvaise purge qu'un quelconque produit du même calibre, ne sert en tout cas strictement à rien ! Si ce n'est creuser un vrai fossé culturel sur la manière dont le cinéma est conjointement respecté d'une part et d'autre de l'Atlantique. Sa sortie en France aura au moins le mérite de booster les ventes du film original. Ceux qui n'ont pas besoin d'être convaincus peuvent boycotter sans regret, c'est exactement la même histoire...