Humains
Le 16/04/2009 à 23:57Par Arnaud Mangin
Plus proche des Randonneurs que de The Descent, Humains s'impose immédiatement comme un gentil nanar parfaitement inoffensif, qui amusera sans mal les amateurs de quinzième degré, mais qui n'a pas une seule qualité pour lui afin de servir le cinéma de genre Made In France auquel il aimerait bien participer. Un monumental ratage, rigolo pour les érudits des perles de Corman(gnon) et Bruno Mattei, ou à ranger dans les abymes de la nullité. Selon l'humeur !
Bonne nouvelle, les hommes de Neandertal ne sont pas morts ! Ils sont juste beaucoup moins nombreux qu'avant, au bas mot quatre ou cinq, et vivent secrètement dans les Alpes-suisses, nichés dans une grotte en bordure de route. Ca, c'est le premier truc qu'on nous demande d'avaler. Chose à laquelle on est plutôt enclin compte tenu de l'énormité du reste du programme. A savoir que Sara Forestier est une paléontologue de renom spécialisée dans la reconstitution de crânes anciens (on ne plaisante pas : à un moment elle est même devant un ordinateur), partie à la recherche de preuves sur la survie probable de quelques hommes préhistoriques dans le coin le plus paumé de la terre... "La Suisse". Ajoutons à cela Philippe Nahon et Lorant Deutsch qui nous la jouent Harrison Ford et Shia Labeouf dans Indiana Jones 4 (qui, étrangement, cherchaient aussi des crânes) en aventuriers top hype, et on obtient donc Humains, le nouveau film de genre made in France dans tout ce que l'appellation peut avoir de péjoratif et qui invente sa propre sous-catégorie. Et oui, on assiste ici au premier Brocéliande-like (si l'on excepte Brocéliande lui-même) puisqu'il nous rappelle ce nanar un peu oublié, en affichant des ambitions et un talent époustouflant au moins comparable. Amen, le touchant Doug Headline n'est plus seul.
"Allez Lorant, on continue de tourner. Tu as signé..."
Pour le sujet qui nous intéresse, on ne sait pas exactement si l'équipe du film s'est dopée au Ricola ou si l'air de la montagne a épuisé tout le monde, mais de mémoire, ça faisait bien longtemps qu'un aussi mauvais film ennuyant comme la pluie ne nous avait pas autant... chagriné. Depuis Brocéliande, tiens. Oui, il n'y a rien de fondamentalement énervant, agaçant ou scandaleux dans Humains. Juste la sensation d'assister à un film ridicule qui s'entretient lui-même, de minute en minute, sans pouvoir lui tendre la main. Une espèce d'objet médiocre qui part à l'assaut la fleur au fusil et qui s'essaye à on ne sait pas trop quoi. Un peu de film d'aventures, un peu de film d'horreur, un peu de mystère sur fond de folklore local (comme Brocéliande, tiens !) et qui à force de s'imposer indirectement comme le chainon manquant entre La Guerre du feu et Les Randonneurs de Philippe Harel, finit par emprunter franchement les tics de mise en scène de ce dernier. Ce qui n'est pas vraiment dans le propos... Surtout que Brocéliande avait au moins réussi à éviter un peu ça.
Mais, paradoxalement, on peut s'amuser. Et oui ! Ce n'est pas évident, surtout lorsque la première moitié du film a endormi une partie de la salle, mais on peut... D'une part, parce que les ambulances sont faites pour qu'on leur tire dessus et que les deux réalisateurs d'Humains distribuent des fusils comme s'il en pleuvait. Mal écrit, mal monté, mal cadré et sans la moindre énergie (voir les héros traverser un courant d'eau trèèèèès dangereux, mais qui leur arrive aux mollets, c'est quand même super drôle), le film bénéficie surtout d'une gestion des dialogues et d'une interprétation d'acteurs au petit oignons qui combleront sans mal les férus de nanars qui écopent ici d'un best-of évoluant crescendo. Tout le monde crie et s'énerve pour entretenir sa sensation de panique, Dominique Pinon menace d'exécuter l'un de nos chers ancêtres si les autres ne baissent pas leurs armes (et bien évidemment, ils ne comprennent pas) et seuls les effets de maquillage nous rappellent que le film n'a pas 30 ans. Du vrai cheap hyper bis presque trop appuyé !
Sans tomber dans le mépris, Humains est un film qui fait ouvertement pitié au sens premier du terme, plombé par un amateurisme et une pauvreté artistique et technique qui suscite plus une gentille moquerie que de la haine, comme si un mauvais téléfilm de bazar italien avait franchi, par miracle, les frontières sacrées du grand écran... Comme Brocéliande !