Incognito
Le 05/03/2009 à 11:15Par Michèle Bori
Dubosc et Bénabar dans un film réalisé par celui qui nous avait offert Poltergay, il y avait de quoi s'attendre au pire. Mais, contre toute attente, Incognito se révèle être une comédie extrêmement drôle, plutôt bien écrite (surtout au niveau des dialogues, ça sent le culte) et particulièrement bien jouée. Mention spéciale à Franck Dubosc qui trouve enfin avec ce film le terrain de jeu adéquat où incarner ce personnage de looser un peu ringard qui (lui) plaît tant. Comme quoi, on n'est jamais à l'abri d'une bonne surprise !
Difficile d'affirmer sans avoir le nez qui pousse qu'on attendait monts et merveilles d'Incognito. En effet, avec le réalisateur du très moyen Poltergay aux commandes et Franck Dubosc (qui malgré des qualités de show-man indéniables n'a jamais su convaincre au cinéma, remember Camping et Disco) et Bénabar (qui se traîne depuis ses débuts une étiquette de chanteur pour bobos) dans les rôles principaux, cette comédie partait avec plusieurs handicaps du côté du capital sympathie. Des handicaps qui allaient demander un bon paquet de qualités pour nous convaincre qu'Incognito n'était pas juste un énième bouche-trou pour prime-time télévisuel tel qu'on continue à en voir toutes les semaines sur les écrans. Résultat des courses : ô miracle, les qualités escomptées sont belles et bien présentes dans le film. Et même plus encore !
Avec son pitch de départ basé sur un quiproquo plutôt cocasse (un chanteur à succès retrouve par hasard un vieil ami qu'il croyait mort et auquel il a piqué tous les textes qui ont fait sa gloire), Incognito se distingue surtout par une grande qualité d'écriture dans ses dialogues (tout simplement hilarants) et une gestion très précise du timing de la comédie, qui doit beaucoup à l'interprétation de ses acteurs. Si Bénabar assure plutôt bien pour ses premiers pas devant une caméra, c'est surtout - et là, on peut dire que c'est quand même une belle surprise - Franck Dubosc qui tire le mieux son épingle du jeu, en se voyant offrir ce qui peut facilement être considéré comme son meilleur rôle au cinéma (et comme le souligne à ce sujet Eric Lavaine, le réalisateur du film : "Un acteur, pour donner toute l'étendue de son talent, a besoin de textes corrects." voilà, ça c'est pour toi Fabien).
A l'instar de ce qu'il proposait dans ses précédents travaux, Dubosc fait du Dubosc. Mais là où Incognito se démarque, c'est qu'il parvient à capter le potentiel comique et les attitudes de looser du bonhomme pour en faire non pas un héros, mais un second couteau, un side-kick dans la plus pure tradition de la comédie. C'est très bête, c'est parfois facile, mais alors qu'est ce que c'est drôle ! Dans la peau d'un mime raté essayant tant bien que mal d'aider son ami à couvrir son affreux mensonge, Dubosc nous offre là une partition "à la François Pignon", à la fois loufoque et touchante. D'ailleurs, en sortant d'Incognito, on se fait vite la remarque que l'ombre de Francis Veber plane étrangement sur la totalité du métrage, lui qui pendant toute sa carrière fit de ce genre de personnages et de situations comiques la pierre angulaire de son cinéma, (avant de finir par s'auto-parodier, RIP).
Pour le reste, on retiendra également la partition très justes des acteurs secondaires que sont Jocelyn Quivrin (99 Francs) en ancien toxico fraîchement débarqué des Indes, et la délicieuse Anne Marivin (Bienvenue chez les Ch'tis) qui malgré un rôle plus anecdotique que les autres parvient à illuminer l'écran par son sourire et son regard. L'histoire quant à elle, pour peu que l'on accepte son point d'attaque saugrenu et un peu light, s'avère riche en moment forts (dont une bonne scène de cuite particulièrement fun), dispose d'un modernisme de bon aloi (on y parle de notre président comme "un mec marié à une chanteuse", enfin une comédie ancrée dans son époque !) et se trouve menée sur un très bon rythme grâce auquel on ne s'ennuie jamais devant cet Incognito de bon cru. Peut être manque-t-il à l'ensemble d'une véritable ambition de mise en scène pour arriver à totalement surprendre, mais en l'état, nous sommes en présence d'une bobine plutôt étonnante de la part de celui qui avec Poltergay nous avait offert une comédie bien grasse et sans subtilité aucune. Comme quoi, il est bien regrettable que si peu de réalisateurs puissent faire de second long en France ... on passe peut-être à côté de nombreuses surprises.