Le Mac

Premier argument justifiant d'aller voir le film, José Garcia porte bien sûr Le Mac sur les épaules de bout en bout et ce à travers trois personnages : le mac en question, le frère jumeau comptable ignorant tout de son existence, et un mélange des deux, ce dernier, obligé de remplacer le premier, donnant lieu à une véritable troisième composition. La force d'interprétation de l'acteur, que nous n'avions pas vu dans une comédie depuis bien (trop) longtemps, a toujours mérité de trouver un film digne de sa carrure. Marquant dans beaucoup de seconds rôles au milieu de films tristounets (Le Boulet par exemple), Le Mac s'impose comme un festival autour de Garcia, littéralement habité par ses rôles. Mais si on ne compte plus en France le nombre de personnages réussis perdus au milieu d'un film au point mort en terme de réalisation ou de production, Le Mac vient corriger le tir. Et c'est surtout ce point là qui le sort du lot.

Pour son premier film, Pascal Bourdiaux (habitué derrière la caméra de la série Un Gars, une fille) place la barre assez haut en choisissant contrairement à bon nombre de comédies de justifier dans chacun de ses plans son utilisation du format scope. Grâce à une production fouillée (décors, photo, accessoires) avec Thomas Langmann à la barre, et un langage de la caméra 100% "cinéma" sans sombrer dans le "m'as-tu vu" envahissant, le film mérite sa place dans une salle de cinéma. Il n'y a rien de bien renversant bien sûr, aucune révolution de mise en scène n'étant à relever ici, mais Le Mac montre à quoi devrait ressembler une comédie pour justifier sa présence hors de la télévision. Quelques petites maladresses subsistent certes, comme l'utilisation de la chanson Kung-Fu Fighting (en trop) dans une scène des meilleures scènes du film, la gratuité du split-screen lorsque Garcia enflamme le dancefloor, ou encore la dernière scène techniquement trop cheap (la seule vraie fausse note en terme de production) et bien moins inspirée en réalisation. Mais ce ne sont que des détails face au reste du travail, à savoir un découpage parfait servant les gags (souvent très drôles), les situations (la scène de combat entre José Garcia et un chien, filmée en ombre chinoise, est un summum), et surtout un scénario jamais lourdaud, que ce soit dans ses gags ou l'histoire-prétexte, certes déjà vue mais tellement carrée et efficace qu'elle sert le film idéalement. Nous avons encore les scénarios simili-polar d'une pauvreté sans nom, comme celui de Tais-Toi de Francis Veber, à travers la gorge.

Mais le vrai point fort reste l'attention portée aux petits détails, souvent négligés dans la comédie francophone contemporaine. A commencer bien sûr par une galerie de tronches comme on en voit peu souvent, de Arsène Mosca (le dealer de 99 Francs, Palizzi) à Gilbert Melki en passant par Joe Prestia ou Doudou Masta jusqu'à la sublime Catalina Denis : chacun est dirigé au poil, filmé pour servir le cadre de la cam, l'ambiance, éclairés avec soin, au sein d'un découpage sans débordement.

Le Mac, comédie parfaite ? Ce serait trop vite dit. Les atouts du Mac le placent dans une position difficile : de part le sérieux de sa fabrication, il devient un des rares produits français de ce genre comparable avec les bonnes comédies américaines. Et c'est là que le bât blesse. Il manque encore au Mac une dose de folie, une fin marquante (celle du film est assez bidon), un lâchage intégral et encore un bon cran dans ses ambitions. Mais Thomas Langmann et Pascal Bourdiaux montrent la voie en prenant le genre de la comédie au sérieux, loin des nivellements par le bas des productions Besson (au hasard). Combien de comédies françaises méritent le même compliment ?