Critique : Lost - Saison 5
Le 04/06/2009 à 18:47Par Arnaud Cuirot
Avec cette cinquième saison très réussie, peut-être la meilleure, Lost confirme être l'un des derniers poids lourds à maintenir la forme. Généreuse dans ses révélations, cohérente dans son ensemble et pourtant ultra efficace, la série ne prend jamais les spectateurs pour des gogos. Bon point pour les fans, l'intrigue avance à grands pas et les véritables enjeux de l'île commencent à apparaître. Un Deus Ex Machina qui ne plaira peut être pas à tout le monde mais qui promet un final véritablement épique.
Il est d'ores et déjà acquis que la sixième saison de Lost sera la dernière et cette cinquième saison de dix-sept épisodes s'annonçait donc à priori comme une simple préparation au grand final. Les spectaculaires chutes d'audiences aux Etats-Unis n'auguraient d'ailleurs rien de bon pour les fans de la série... Pourtant, cette saison se révèle haletante et profite des solides bases posées dans les saisons précédentes.
Pour ceux qui souhaitent se forger leur propre opinion, Lost saison 5 est actuellement disponible en VOD sur TF1 Vision.
Synopsis.
Trois ans après être rentrés sur la terre ferme, Ben et Jack tentent de convaincre les survivants (et Locke mais comme il n'est plus un survivant du tout, il n'est pas dur à convaincre... juste à transporter) à retourner faire un petit tour sur l'île parce que c'est leur destin et accessoirement aider leurs amis restés sur place. Une idée bien entendu qui est loin de faire l'unanimité parce que quand même, il ne faut pas exagérer, ce n'était pas tout le temps la fête. De leur côté, un groupe composé de Sawyer, Locke (encore lui...), Juliet, Miles, Charlotte et Faraday effectue des bonds dans le temps, levant ainsi le voile sur un certain nombre de secrets.
Flash-back-forward du passé qui va bientôt arriver dans le futur.
Attention mal de crâne en perspective au cours de toute la première moitié de la saison ! Centrée sur les voyages dans le temps, la narration est construite plus que jamais comme une mosaïque où chaque groupe, pour ne pas dire chaque personnage, est inscrit dans sa propre trame temporelle faisant ainsi imploser les notions de flash-back et de flash-forward qui finalement ne sont plus que des scènes comme les autres. Alors, compliquée à suivre cette première moitié de saison ? Pour le coup oui! Le spectateur est dès lors condamné à ne rater aucune seconde de la série sous peine de perdre le fil. La solution de facilité pour les feignants consistant bien évidemment à gober les révélations comme elles arrivent et à ne pas trop se poser de questions. Une solution envisageable mais déconseillée tant cette première moitié de saison se révèle solide et finalement indispensable pour comprendre les enjeux entourant l'île. Un peu avant la moitié de saison, une jonction se fait entre deux groupes, mais pas tous les personnages (puisque certains d'entre eux suivent le cours normal du temps), dans des conditions et à une époque que nous tairons pour ne pas gâcher le plaisir. La série revient dès lors à une narration plus classique, « simplement » partagée entre deux époques mais très simple à suivre.
Malgré tout, il serait une erreur de penser que cet amoncellement de scènes à des époques variées ne mène nulle part et n'est que pur amusement de la part des scénaristes pour paumer le spectateur. Certes, cette première moitié de saison est moins aventurière et moins rythmée qu'à l'accoutumée, pour ne pas dire moins palpitante. Néanmoins ce kaléidoscope forme au fil des épisodes un ensemble cohérent. Les pièces du puzzle se rassemblent, levant ainsi progressivement le voile sur un certain nombre d'événements mystérieux (Le retour de Locke sur la terre ferme et son décès par exemple). Les enjeux de l'île et des différentes factions apparaissent également plus clairement. Il en ressort la certitude que les scénaristes ne naviguent pas à vue et savent exactement où et comment ils veulent emmener leur histoire.
Afin de ne pas noyer définitivement le poisson et le spectateur qui va avec, le nombre de personnages a été volontairement limité. Aucun énième nouveau personnage ne vient surcharger inutilement l'intrigue même si certains d'entre eux jusque là secondaires prennent une nouvelle envergure, Faraday et Widmore notamment. Conséquence agréable, aucun épisode n'est centré sur un protagoniste dont on se fiche éperdument et qu'on ne verra plus par la suite et une plus grande place est donc laissée pour faire évoluer les personnages principaux, parfois dans un sens surprenant. Ainsi Jack se transforme en désabusé parfois violent et pas si éloigné de Locke qu'il ne le prétend, Sawyer se découvre une passion pour le train-train quotidien, Benjamin Linus fait connaissance avec le remord et présente une facette de lui-même moins cynique et Locke.... ma foi.... ne sera plus jamais le même. La plupart des héros gagnent donc énormément en profondeur, seul Hurley (et c'est bien dommage) restant cantonné à son rôle de brave obèse obnubilé par la nourriture, froussard mais sympa. Hugo Reyes mérite mieux que ce traitement basique et on se met à espérer que la sixième saison rendra justice à ce personnage dont plusieurs indices laissent supposer qu'il est véritablement majeur pour l'histoire et non pas seulement un faire valoir.
Les couches de l'oignon.
Comportant en tout et pour tout dix-sept épisodes, cette cinquième saison avance à grands pas et répond à bon nombre de questions demeurées en suspens comme « Comment Locke a-t-il fait pour quitter l'île, comment est-il mort, qu'est devenu Jin, qu'est-ce que le monstre de fumée, que faisait la Dharma initiative, qui est Charles Widmore et d'où vient sa haine envers Benjamin Linus, quel est le rôle exact de Faraday... ». Petit à petit, les couches de l'oignon sont pelées et quasiment chaque épisode apporte son lot de révélations récoltant ainsi les graines semées dans la saison 4. Au final, le spectateur n'est pas pris pour une chèvre à laquelle on va servir le même mystère pendant douze épisodes en lui faisant croire qu'il aura la réponse à l'épisode suivant (Oh, mais qu'est-ce qui se cache derrière cette trappe ?). En outre, cette cinquième saison jette les bases de la sixième et ultime saison et prend un malin plaisir à laisser filtrer quelques indices de l'enjeu final qui semble véritablement colossal. Le combat des master chief titans, l'affrontement des golgoths 45 ou la bataille de Marcus Fénix contre les Locustes ? Nulle ne le sait encore mais le choix scénaristique d'un Deus Ex Machina promet une ultime saison du tonnerre. Les scénaristes n'auront d'ailleurs pas le droit à l'erreur, sous peine d'être pendus par les pieds, forcés à regarder toute la saga Saw à partir du 2.
Afin de ne pas gâcher la surprise, nous nous permettons seulement de dévoiler cet indice qui risque de mettre l'eau à la bouche de plus d'un spectateur : un élément primordial apparaît très tôt dans cette cinquième saison et vient confirmer quelques soupçons... L'île était peuplée bien avant l'époque contemporaine et les vestiges (comme ce fameux pied à quatre doigts, le monstre de fumée...) ne sont pas uniquement là pour faire beau et mettre de l'ambiance. Bien entendu le mystère reste épais mais les Lostmaniacs peuvent commencer à rayer une à une les théories infondées. L'étau commence très sérieusement à se resserrer.
Alors, cette cinquième saison de Lost, une déception ou une réussite? Incontestablement, ces dix-sept épisodes profitent d'un immense travail effectué en amont, d'un scénario généreux en révélations et de personnages gagnant en profondeur. Mieux, le tout est habilement construit et même la première moitié de saison d'apparence décousue et qui a fait fuir tant de spectateurs aux Etats-Unis finit par s'imposer comme une évidence. Incontestablement cette saison est une franche réussite et Lost ne sombre jamais dans la facilité ou, pire encore, dans l'inutilité. Si la saison 6 se révèle à la hauteur des espérances des millions de fans à travers le monde, alors oui, Lost sera en passe d'accéder au rang envié et trop souvent galvaudé de série culte.