Deauville Asie 2008 : Jour 4
Le 16/03/2008 à 13:28Par Caroline Leroy
La journée a commencé en beauté avec une interview de Aditya Assarat, réalisateur du sublime Wonderful Town, un film qui possède selon nous de bonnes chances d'être cité au palmarès.
Crows Zero, troisième film et pour l'instant meilleur film de la compétition Action Asia, est bien la claque que nous espérions. Nous vous engageons à lire de ce pas à lire la critique du film pour plus de détails.
Nous enchaînons ensuite avec Exodus, le nouveau film du cinéaste hongkongais Pang Ho-Cheung (A.V., Men Suddenly In Black) qui une fois encore fait preuve d'une grande audace dans son postulat de départ. Après avoir interrogé un homme accusé de voyeurisme, un flic (Simon Yam, évidemment) se persuade que les femmes fomentent un complot visant à éradiquer la race masculine. Partant d'un postulat fantaisite, Exodus se présente au premier abord comme un thriller paranoïaque pour s'intéresser finalement, non sans une certaine finesse, aux relations de couple et à la difficulté des hommes et des femmes à communiquer. On pourra reprocher au film de ne pas aller assez loin dans l'exploration de son sujet et d'enfoncer parfois des portes ouvertes, mais si l'on ne perd pas de vue qu'il s'agit avant tout d'un polar à suspense, force est de constater que Pang réussit fort bien son coup. En outre, sur le plan formel, Exodus est un vrai plaisir des yeux et des oreilles. En plus de s'agrémenter de touches d'humour bien dosées (le dernier plan est à ce titre hilarant), le film s'agrémente d'atmosphères très travaillées grâce à une photographie raffinée et une musique fort bien employée. Certaines séquences, notamment un passage entièrement musical voyant Simon Yam filer une femme dans la rue, font penser à du Brian De Palma, ce qui est loin d'être une mauvaise référence.
Après la présentation de Wonderful Town en début d'après-midi, c'est au tour de Fujian Blue de Robin Weng, neuvième film de la compétition, d'être montré au public et au jury du festival. Le jeune réalisateur chinois fait preuve de beaucoup d'humour dans son discours, et donne furieusement envie de découvrir son premier film. Malheureusement, celui-ci n'est pas tout à fait à la hauteur, malgré quelques thèmes forts - l'émigration chinoise, le traffic d'humains à Fujian, la jeunesse désoeuvrée. Le rythme est rapide mais les plans s'enchaînent de manière décousue, pour finir par nous perdre en route au bout d'à peine un quart d'heure de bobine. Le fait que les jeunes héros de Fujian Blue s'avèrent être particulièrement antipathiques n'arrange pas les choses, en particulier lorsque l'on a du mal à les distinguer entre eux et à comprendre ce qu'il fabriquent exactement. Dommage car les dernières secondes laissent échapper une petite pointe d'émotion furtive. Mais c'est bien peu en comparaison de l'ennui mortel qui a largement eu le temps de s'installer tout du long.
De son côté, la compétition Action Asia s'est poursuivie avec un quatrième long métrage, Opapatika, un film thaïlandais de Thanakorn Pongsuwan. Soyons clair dès le départ : Opapatika constitue pour l'instant l'élément le plus calamiteux projeté à Deauville cette année, toutes catégories confondues. Pour commencer, seules les vingts premières minutes de l'histoire sont compréhensibles, tant le scénario s'avère confus et les personnages indignes. L'idée de départ n'était pourtant pas plus honteuse qu'une autre : elle suppose l'existence des Opapatikas, des hommes qui, après leur suicide, renaissent avec des pouvoirs surnaturels mais se voient en contrepartie frappés d'une malédiction. Au lieu de développer son argument fantastique à travers des scènes (comme on fait normalement au cinéma), Opapatika le fait au moyen d'une voix off omniprésent qui plombe littéralement le récit. Le résulat est sans appel : on ne comprend strictement rien à la quête qui occupe les personnages, pas plus qu'aux relations qu'entretiennenet ces derniers. L'ultraviolence qui caractérise l'action aurait pu conférer au film une certaine efficacité, voire un caractère jouissif, mais dès lors que l'on se désintéresse des enjeux (mais au fait, lesquels?), les découpages de membres, tranchages de gorge et autres joyeusetés paraissent tellement gratuits que le film se transforme en une véritable bouillie, voire une agression pour les yeux et les oreilles. Si l'on ajoute à cela une morale puante d'intrégrisme religieux, Opapatika s'impose comme le nanar le plus pénible et le plus indigeste de cette sélection.
La soirée débutera avec Kabei - Our Mother, dernier long métrage du grand réalisateur japonais Yôji Yamada, mais nous en reparlerons demain.