Doctor Sleep "Stephen King a d'abord refusé cette suite de Shining" interview
Le 03/11/2019 à 17:40Par Olivier Portnoi
On est allé à la rencontre de Mike Flanagan et du producteur Trevor Macy (on leur doit la série The Haunting Of Hill House et le film Jessie "Gerald's Game") pour évoquer la sortie de Doctor Sleep (le 30 octobre au cinéma), numéro d'équilibriste envoûtant et réussi entre le Shining de Stanley Kubrick et les romans de Stephen King.
"Au départ, Stephen King ne voulait pas de cette adaptation. Mais une fois qu'il a compris ce que l'on avait en tête, il nous a offert sa bénédiction. Sans ça, nous n'aurions jamais tourné Doctor Sleep" nous a confié le très chaleureux Mike Flanagan.
Doctor Sleep reprend 30 ans après les événements traumatiques de Shining à l'Overlook Hotel. Danny Torrance (Ewan McGregor) a sombré dans l'alcool et la drogue cherchant à taire les voix dans sa tête mais aussi oublier la rage meurtrière de son père. Celle-ci le hante d'autant plus qu'il est lui-même sujet à des explosions de colère. Mais quand il rencontre Abra Stone, une adolescente aux dons extrasensoriels, ses vieux démons resurgissent. Car la jeune fille a besoin de son aide pour lutter contre des créatures maléfiques.
Que gardez-vous de votre première rencontre avec Stephen King ?
Mike Flanagan : La première fois que l’on a réellement rencontré Steve (Stephen King) fut après que le film soit fini. On est allé chez lui afin de le lui projeter. Je n’ai pas pu respirer pendant les 2 heures et demi de la projection tellement j’étais angoissé (rires).
Il a néanmoins contribué au développement du film ?
Oui. On a eu divers conversations avec lui au cours de l'écriture du scénario. On en était pas à notre premier contact. On a adapté Jessie (disponible sur Netflix) qu’il a aimé. Mais pour Doctor Sleep, il a été difficile d'avoir sa bénédiction dès le départ. Il n'était pas réceptif à l'idée que l'on prenne son histoire et qu'on l’intégre au film de Kubrick (qu'il déteste - ndr) avec l'esthétique cinématographique de Kubrick. Au départ, il a été contre. Mais il nous a finalement accordé sa bénédiction une fois qu’il a compris ce que l’on voulait faire. Sans ça, on aurait jamais fait ce film.
(Mike Flanagan et son producteur Trevor Macy)
"Stephen King avait mis des ballons rouges gonflés à l'hélium comme ceux de ÇA dans ma chambre d'hôtel le soir où je suis arrivé. J'ai flippé !"
Stephen King est-il quelqu’un d’amusant ou d’étrange ?
Oh mon dieu, il est incroyablement drôle et gentil. Pour quelqu’un qui écrit des livres si horrible et si ténébreux, il est plein de joie. Il agit presque comme un enfant par moment. Il avait mis des ballons rouges gonflés à l’hélium comme ceux de ÇA dans ma chambre d'hôtel le soir où je suis arrivé. Je n'en savais rien ! J'entre dans ma chambre, il fait noir et là je vois les deux ballons rouges (rires). J'ai totalement flippé ! Il est tellement amusant et un peu fou, et c'est réellement quelqu'un d'authentiquement gentil.
Qu’est ce qui vous a attiré vers cette histoire ? Ce livre est profondément autobiographique pour Stephen King.
Ce qui m’a attiré vers cette histoire c’est..... De la même manière que Shining représente Stephen King face à son alcoolisme, Doctor Sleep est sa manière d’étudier les conséquences de cette période de sa vie après des décennies de sobriété. Si Doctor Sleep traite de reconstruction et The Shining d’addiction, ces deux faces de la même pièce sont fascinantes et résonnent en moi. C'est aussi un roman sur la responsabilité et sur ce que des traumatismes survenus à l’enfance peuvent créer chez des individus une fois qu’ils sont parvenus à l’âge adulte. Il traite aussi de réconciliation avec son passé quand on vient d’une famille brisée. Il y a tant de sujets qui me touchaient personnellement dans ce livre.
Finalement, ce sont un peu les thèmes de The Haunting Of Hill House ?
.. oui… c’est vrai. Ce qui rendait d’autant évident le fait que l’on devait faire ce film.
"On a truffé le film de références à Stanley Kubrick et à l'oeuvre de Stephen King. A vous de les trouver !"
L’adresse de la jeune Abra Stone (l'ado que vient aider Danny Torrance) est 1980, soit l’année de la sortie de Shining au cinéma. J’imagine que ce n’est pas une coïncidence ?
Bien sûr que non (rires). On a essayé de cacher autant de clins d’oeil que possible pas seulement à Shining mais aussi à Stanley Kurbrick et Stephen King. Mais bien vu pour celui-là. Beaucoup de gens le loupent.
Pouvez-nous parler un peu des autres "easter eggs" de Doctor Sleep ?
Il faut les chercher. C’est le jeu (rires). Je peux juste dire que les réfèrences sont nombreuses notamment à la saga de La Tour Sombre.
Votre film est autant lié au Shining de Stanley Kubrick qu’au livre et à sa suite imaginée par Stephen King. On imagine que cela a été un numéro d’équilibriste pour fusionner les deux sachant que King a toujours renié le film de Kubrick.
Oui, cela a été incroyablement angoissant, intimidant et stressant. Aucun d’entre nous n’a bien dormi pendant quelques temps. Pendant même deux ans. C’était le coeur de ce projet de parvenir à réconcilier les deux. J'ai eu une crise d'angoisse le jour où je lui ai envoyé le scénario. On a essayé d'aborder ce film en tant que fans des deux camps. Stephen King a été assez aimable pour nous laisser carte blanche et on a pu hériter du langage cinématographique de Stanley Kubrick.
"J'aimerai adapter d'autres livres de Stephen King. On a quelques idées vraiment excitantes".
Y-a-t-il d’autres romans de King que vous aimeriez adapter ?
Bien sûr. Il y en a tellement. Par deux fois, ils nous a laissé jouer dans son terrain de jeu, ce qui est un honneur. Et il a été heureux du résultat les deux fois. Je ne veux pas ternir ce sans-faute. Mais on parle déjà avec lui de ce que l’on aimerait faire à l’avenir. On a quelques idées vraiment excitantes. J’espère que l’on pourra bientôt en parler officiellement. Mais oui, j’espère que l’on pourra continuer à jouer dans cet univers pendant encore de nombreuses années.
Doctor Sleep est une production Warner. Warner ne vous a jamais proposé de film DC ?
Si (rires). C'est d'ailleurs grâce à ça que je me suis retrouvé attaché à Doctor Sleep. J'étais venu les voir pour évoquer un projet DC et je venais de réaliser Jessie d'après Stephen King. C'est ainsi que notre collaboration avec Warner a débuté.
Vous développez sembe-t-il une passion pour filmer les maisons hantées. Que cela soit l’Overlook Hotel ou Haunting Hill.
(rires). Les bâtiments, qu’ils soient des hôtels, des manoirs, des maisons, collectionnent les souvenirs des gens qui les ont habités. Notamment si ces lieux ont été des demeures familiales. On agit tous différemment entre les murs de nos maisons. On agit tous différemment que partout ailleurs dans le monde. C’est ce qui rend les maisons hantées si fascinantes. C’est que font ces personnages derrières leurs rideaux ou portes fermées qui m'intriguent. C’est tellement riche. Les possibilités sont infinies.
"On a appris l'existence de la scène de Shining dans Ready Player One la veille de la sortie du film."
Avez-vous été surpris par la revisite de Shining par Ready Player One ? Etiez-vous au courant que Steven Spielberg avait l’intention de la recréer ?
Non. On a appris que cette scène existait la veille de la sortie du film. On est allé le voir le week-end de la sortie en étant très stressés. Ce qui était génial assis dans ce cinéma, c’était de contaster la joie des spectateurs d'être à nouveau plongés dans l’Overlook Hotel. Cela nous a conforté dans notre approche pour Doctor Sleep. Je me suis dit que si Ready Player One parvenait à faire jubiler les spectateurs dans un laps de temps si court, j’espèrais que l’on parviendrait à la même chose et même encore plus avec ce film. Cela a été très positif pour nous de voir ça. La grande différence avec Spielberg est que notre Overlook Hotel est une vraie reconstruction des décors de Kubrick et non pas juste du numérique.
"J'ai adoré la série française MARIANNE"
Halloween arrive. Quel film ou quelle série nous recommenderiez-vous cette année ?
Je recommande Marianne que je viens de terminer et que j’ai adoré et qui possède également beaucoup de saveurs à la Stephen King. C’est une série très effrayante, passionnante, avec des personnages forts. Honnêtement, elle m’a terrifié. Ce qui est toujours bon signe.