Evangeline Lilly "J'ai été française dans une autre vie. J'adorerais tourner en France" Interview Ant-Man 2
Le 31/07/2018 à 16:09Par Veronica Sawyer
Evangeline Lilly : J’ai été française dans une autre vie (rires). En maternelle, je vivais à Alberta, c’est le Texas du Canada, une province très anglophone avec du pétrole et des cowboys. Chaque soir, je revenais de l’école en disant "maman, je m’ennuie, je veux aller à l’école française". Ma mère me répondait : "Evangeline, tu as cinq ans, comment sais-tu qu’il existe des écoles françaises ? et non !". Je ne sais pas d’où m’est venue cette envie. Personne ne parlait français dans ma famille et aucun de nos amis non plus. Mais dans ma tête, il fallait que j’aille à l’école française. J’ai été si tenace que ma mère a finalement accepté de m'y mettre. Et j’ai adoré. J’ai appris la langue très rapidement. J’ai suivi des cours de français jusqu’à mes 11 ans puis j’ai dû changer de programme scolaire. J’ai beaucoup perdu entre temps. Mais merci de me dire que je parle encore bien.
Vous aimeriez jouer dans un film français...
J’adorerais jouer dans un film français. Je serais intimidée car j’ai un accent. Mais je pourrais être la canadienne qui débarque en France.
Pourquoi vous sentiez-vous ainsi ?
Je me suis posée la même question. "Pourquoi est-ce tu craques sur le plateau de Ant-Man et la Guêpe ?" me suis-je demandé. Je n’ai pas été sexuellement harcelée par Harvey Weinstein, je n’ai jamais eu d’expérience de casting canapé. Alors pourquoi est-ce que cela m'a autant déchiré émotionnellement ? Cette révélation publique nous a contraintes en tant que femme, que l’on ait été abusées sexuellement ou pas, de prendre conscience de toutes les choses que l’on a cherché à ignorer ou auxquelles on a dû s’adapter au lieu de les affronter. Si au travail, j’ai le sentiment que l’on n’écoute pas mes idées contrairement à celles des hommes, je m’adapte. Je me mettrais pas à crier en exigeant d’être écoutée. Ok je n’ai pas été écoutée, qu’est ce que je peux faire pour être écoutée ? Faut-il que je parle un peu plus comme un mec, que je marche comme un mec, que je fasse des blagues comme un mec ? C'est ce que j'ai fait pendant des années. Mais j’ai compris que je n’étais en fait que l’ombre de moi-même. Je me suis cachée pendant des années en m'adaptant aux attentes des hommes. Je voulais être belle, cool, athlétique. J’ai fait des études de mathématiques et de physique, j’ai même joué dans l’équipe de football de mon université. J’ai tout essayé pour gagner leur respect et leur plaire. Il m'a fallu du temps avant de comprendre que je n’avais pas de pénis ! L'affaire Weinstein nous a montré qu'il était nécessaire que notre statut change.
Le public ne se rend pas compte de l’impact émotionnel de notre métier. Je ne suis pas une actrice entraînée. Je n’ai pas de méthode. Je vais juste sur le tournage et je ressens ce que mon personnage ressent. Si c’est de l’angoisse, je la ressens réellement. J’ai été coincée dans une position horrible pendant trop longtemps. J’avais envie d’être heureuse, de me sentir heureuse, d’écrire des histoires, de m’amuser et rire avec mes amis.
Ceci explique peut-être le choix de mes projets depuis (Le Hobbit, Ant-Man). J’ai désormais envie de m’amuser dans mon travail. Et avec le recul, j’ai une autre approche de la célébrité. Je me suis rendue compte que j’avais mal jugé les fans. Je pensais que leur attention était fausse et superficielle. J’ai compris que je m’acceptais pas assez pour imaginer que d’autres gens pouvaient m’apprécier. Aujourd’hui quand un fan m’approche, au lieu de vouloir l’éviter, je lui tends la main et je suis reconnaissante.
Qu'est ce qui vous fait sortir de votre retraite ?
Peter Jackson. Et le rôle de Tauriel. J'ai grandi avec ce livre de Tolkien. C'était comme un rêve devenu réalité.