C'est désormais une confirmation : le cinéma de Terrence Malick, dans tout ce qu'il peut parfois avoir de contemplatif, gagne énormément à être (re)découvert en Haute définition. Il est évident que le Blu-Ray abonde dans le sens de l'esthétisme naturaliste du metteur en scène et inversement, ne donnant plus aucune raison valable de ne regarder le film qu'en DVD ou quelconque autre format. Par ailleurs, originellement conçu par Criterion pour le disque américain disponible depuis quelques mois, l'image proposée ici est un tout nouveau master supervisé par Malick lui-même ainsi que son directeur de la photographie à partir d'un Datacine 4K, scanné depuis la copie 35 mm d'origine. Premier bon point, donc, puisque le master est totalement immaculé du moindre artefact ou poussière et impose une pureté digne d'un tournage récent. Mais l'apport de la HD permet surtout de profiter d'un piqué creusé très profondément affichant le moindre détail jusqu'à perte de vue. Se situant dans des paysages paradisiaques, malgré son histoire douloureuse, La Ligne Rouge dispose d'un cadre naturel habilement mis en valeur dont on peut saisir ici toutes les nuances et justifie la longueur parfois palpable du film : outre son intrigue, on regarde surtout le film pour la beauté des images qu'il étale. Piqué soigné, épaulé par une gestion colorimétrique appuyant son univers parfois paradisiaque (belle mise en avant des bleus et des verts) et contraste aux petits oignons en font une démonstration visuelle immédiate.
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Puisqu'il est question de pureté, le Blu-ray de la Ligne Rouge est une occasion supplémentaire de se laisser séduire par la version originale puisqu'elle est proposée ici via un DTS HD Master audio 5.1 plutôt stupéfiant. Certes, on ne constate bien évidemment pas la chose dans les premières séquences du film, plutôt calmes, mais on y décèle néanmoins un ciselage et une précision offrant un naturel indiscutable à toute cette sobriété. Notamment dans la restitution des voix. Mais c'est évidemment lors des séquences de batailles et/ou à grand spectacle que cette piste ouvre enfin les vannes et s'impose tel un mastodonte. Le mixage se veut habile puisqu'il reste assez sage dans son enveloppement mais en profite pour devenir d'autant plus percutant lorsque, soudainement, grenades et balles fusent de toutes parts. Les amateurs de sons lourds apprécieront par ailleurs l'utilisation de leur caisson de basses, dont l'activité n'est vraiment pas en reste. Pour la VF, c'est sans surprise que l'on constatera l'unique présence d'une piste DTS standard. Evidemment, si cette dernière n'est pas honteuse en soi, elle ne proposera jamais le même relief et le même souffle que la piste anglaise.
L'interactivité du Blu Ray de La Ligne Rouge est comparable à l'image de son réalisateur dans le paysage hollywoodien : il n'y apparait pas, mais son ombre plane constamment sur les heures de visionnage proposées ici. Et parmi ces heures, les plus importantes prennent place à nul autre endroit que Le Commentaire audio qui s'étend ici sur 2h50 ! Il faut donc y être soit préparé, aimer l'exercice en soi ou bien être un fan hardcore du film puisque c'est une grosse rasade que l'on nous propose. Si Terrence Malick est donc absent de cette piste, il est néanmoins substitué par son producteur, son directeur artistique et son directeur photo. Soit les talents les plus intéressants pour une peuvre comme celle-ci où le fond du film transite par l'onirisme de ses images. Chose que les intervenants assument totalement dans un discours certes parfois obséquieux à l'encontre du cinéaste, mais loin d'être dénué d'intérêt. C'est juste que… c'est très long. Vous êtes prévenus.
Terrence Malick sera également ci(é de toutes parts dans les suppléments suivants, qui ont ce mérite d'être plus digestes que le commentaire, même s'ils le complètent habilement. Ainsi, Le point de vue des acteurs (34min) laisse la parole à Sean Penn, Thomas Jane, Jim Caviezel et bien d'autres qui se remémorent un tournage évidemment inoubliable, son incroyable complexité comme leur relation avec le réalisateur. Deux modules techniques accompagnent ces interviews. Le premier, Le Montage (24min30) s'intéresse – comme son nom l'indique – au montage. On appréciera pourtant la longue analyse et la pertinence du sujet, rarement aussi développé dans les bonus traditionnels. Ici, les trois monteurs du film reviennent sur leur parti pris pour aboutir au résultat que l'on connait. Le second est une interview du compositeur Hans Zimmer (17min) évoquant lui aussi ses relations avec Malick et son travail pour aboutir à la musique du film telle que nous la connaissons.
Parmi les Scènes coupées (13min36) dont la durée totale parait très minime compte tenue de la longueur du film, on appréciera essentiellement l'apparition de Mickey Rourke, non retenue dans le montage définitif. Outre la bande annonce, le disque propose enfin Guadalcanal aux actualités (15min21), des journaux d'époque restituant une version édulcorée des affrontements et de la victoire des américains. On "s'amusera" du contraste avec la dureté du film et la douleur que les soldats ont enduré lors des batailles.
On notera que l'édition Criterion dont sont tirés tous les suppléments proposés ici (chapeau à Fox de les avoir récupérés) proposait néanmoins d'autres bonus dont la durée totale s'élevait à 45 minutes, mais absents ici. Absence qui explique la note 4 au lieu de la note maximum.