L'image de cette édition est presque parfaite. Le transfert s'appuie sur un master d'une propreté quasi irréprochable et ne trahit que très peu de défauts de compression. Qu'il s'agisse de mettre en valeur les visages des comédiens ou la beauté des décors, la qualité de la définition fait des merveilles, l'ensemble se dotant même d'un piqué magnifique permettant d'apprécier l'image dans ses moindres détails. Les textures ressortent ainsi avec vivacité et la profondeur de champ se voit agréablement appuyée. On retrouve les couleurs et les éclairages naturels des extérieurs tandis que la palette colorimétrique qui caractérise les intérieurs, et qui joue sur un nombre limité de teintes, se voit elle aussi fidèlement restituée, soutenue en cela par une gestion des contrastes soulignant les zones d'ombre. Une ambiance visuelle presque intacte, donc, à un petit détail près qui explique que nous n'ayons pas mis la note maximale : la présence vers la fin du film de quelques plans sur lesquels le noir profond tire soudainement vers le rouge. Les plans présentant cette anomalie sont en nombre restreint mais ils suffisent à entacher un peu le final magnifique du film. Quel dommage !
Si l'image ne s'avère pas irréprochable, les pistes son ne présentent pas de défaut notoire et sont même d'excellente facture. On passera vite sur le stéréo espagnol qui bénéficie d'un mixage sans bavure même s'il fait forcément pâle figure face à ses deux concurrents. Les choses sérieuses commencent avec le 5.1 français qui fait preuve d'une clarté exemplaire et d'une puissance tout à fait sympathique, tandis que la répartition entre les canaux se joue de manière efficace, stimulant juste ce qu'il faut les arrières et le caisson de basse pour créer l'effet d'enveloppement que l'on attend d'un son multicanal.
Mais notre préférence ira vers le DTS espagnol, non seulement pour des raisons linguistiques (sachant que le doublage français est honorable) mais aussi parce que le film y gagne en puissance atmosphérique. Pourtant, la différence n'est pas immédiatement décelable à l'écoute puisque le niveau de décibels semble être à peu près le même entre le 5.1 et le DTS. Ce dernier offre toutefois une ampleur sonore accrue grâce à une spatialisation encore plus chiadée, plus fluide, et un rendu encore plus aiguisé des effets sonores. Les scènes au cours desquelles les fantômes de la demeure se manifestent gagnent ainsi en pouvoir d'immersion, notamment lorsque les basses sont stimulées. Il faut ajouter que la composition musicale sait se mettre en valeur, et on n'en attendait pas moins d'elle compte tenu de son rôle non négligeable dans la narration. Du beau travail.
DVD 1
En plus du film lui-même et des habituels menus qui l'accompagnent (audio, chapitres, liens Internet), l'éditeur nous propose de régler notre matériel afin de profiter au mieux de la norme THX à travers des tests. Cette série de tests audio (tests des canaux, redistribution de la basse si nécessaire) et vidéos (niveaux de gris, nuances de blanc, etc.) est complétée au fur et à mesure par des explications claires concernant l'utilité de chacun.
Ce premier disque comporte aussi et surtout en guise de bonus un commentaire audio par le réalisateur Juan Antonio Bayona et le scénariste Sergio G. Sanchez. Deux intervenants extrêmement bavards qui, loin de se contenter de livrer des anecdotes (même si celles-ci ne manquent pas à l'appel), nous révèlent tous les petits secrets de l'histoire, tout en tenant compte de la possibilité de choisir entre la théorie des fantômes et la théorie psychologique. S'il leur arrive de s'égarer légèrement dans leur discussion - leur complicité est palpable -, ils se montrent passionnés et s'avèrent très portés sur l'analyse de leur propre film et des mécanismes psychologiques suivis par le personnage principal. Mentionnons aussi qu'il faut compter pendant une bonne dizaine de minutes avec la présence d'une invitée surprise : au beau milieu de la projection, le réalisateur contacte directement Belen Rueda par téléphone, la comédienne se livrant au pied levé, du volant de sa voiture, à un commentaire des séquences du deuil et de l'accident de Begnigna !
DVD 2
Juan Antonio Bayona introduit lui-même ce second DVD. L'essentiel des bonus se concentre sur la fabrication à proprement parler du film, abordant différents aspects de la conception et de la production et revenant sur les scènes phares du film.
Commençons doucement avec le Making of (12mns12) qui n'est clairement pas la pièce maîtresse du DVD. Dès les premières minutes, on comprend que l'on a affaire à une featurette essentiellement promotionnelle et donc sans grand intérêt, d'autant que tout va beaucoup trop vite pour que l'on ait réellement le temps d'assimiler ce qui est dit. Du superflu.
Pour en savoir plus sur la fabrication du film, on se tournera donc sans hésiter vers la Conception de L'Orphelinat, qui se compose de six mini making of. Le Décor (2mns30), En illuminant l'obscurité (5mns18) et Les maquillages (5mns48) ressemblent à des featurettes classiques s'appuyant sur le commentaire des effets développés par les techniciens concernés. Chacun de ces modules s'avère concis et assez informatif et l'on apprend notamment que l'orphelinat lui-même a été entièrement construit pour le film. Générique du début (2mns33) et La séance de medium (6mns47) s'attardent au contraire sur une scène précise pour développer un aspect de la fabrication du film. Le commentaire de l'illustrateur sonore sur la séance de medium n'est pas dénué d'intérêt mais s'avère peu fourni. Enfin, dans Générique du début, J.A. Bayona joue les maîtres d'école devant des petits enfants chargés de déchirer du papier pour la création du générique.
Scènes coupées (9 scènes)
Il s'agit là non seulement de scènes coupées mais aussi de versions longues de scènes écourtées au montage. Pour ce qui est des moments développant l'ambiguïté quant à l'intervention ou non du fantastique dans l'histoire, les choix du réalisateur se justifient chaque fois pleinement puisqu'ils permettent d'entretenir davantage le mystère, l'une des forces majeures du film. Nous pensons notamment à la scène de la grotte, où l'on découvre ce qu'il y a derrière la grotte, ce qui gâche légèrement l'effet : ne pas savoir ce qui se trouve dans la zone obscure est bien plus efficace puisque cela renvoie directement à l'Inconscient et aux peurs qui y sont enfouies. Là où nous nous montrons un tantinet plus sceptique, c'est dès lors qu'il s'agit de la relation entre Laura (Belen Rueda) et Carlos (Fernando Cayo). Un peu survolée dans le film, celle-ci aurait pris davantage de saveur si l'on avait ajouté la scène de la balançoire et laissé le baiser manqué dans celle de la Discussion.
Entretien avec Guillermo Del Toro et Juan Antonio Bayona (8mns17)
C'est principalement le producteur Guillermo Del Toro qui s'exprime au cours de cet entretien, tandis que Juan Antonio Bayona reste bien sagement à côté de lui, n'intervenant que sporadiquement. De toute façon, Bayona aura tout le loisir de s'exprimer dans les bonus qui suivront. Entre deux plaisanteries, Guillermo Del Toro revient sur son apport en tant que producteur et sur l'aspect qui l'a attiré dans le film, à savoir la thématique commune avec Le Labyrinthe de Pan.
Entretien avec Belen Rueda et Juan Antonio Bayona (27mns52)
Il s'agit là de la pièce maîtresse de ce second disque puisque les deux intervenants, le réalisateur et la comédienne principale, s'avèrent tout simplement passionnants.
L'interview de Juan Antonio Bayona débute sur un registre personnel puisque le cinéaste évoque les raisons qui l'on poussé à vouloir faire ce métier (pour spoiler un peu, tout a commencé avec Superman!), ses premiers souvenirs de spectateur. La suite de l'entretien s'attarde plus précisément sur le film, tourné en studio pour restituer l'esprit des vieux films admirés par le cinéaste, et sur l'implication de Guillermo Del Toro. Enfin, Bayona nous livre des considérations pertinentes sur le rapport respectif du cinéma américain et européen à l'enfance mais aussi sur le genre du cinéma d'épouvante aujourd'hui et la manière dont L'Orphelinat s'en démarque.
De son côté, en plus de revenir sur son personnage, Belen Rueda nous fait part de réflexions fort intéressantes sur le métier d'acteur. Il est rare que ces derniers parlent aussi ouvertement de la relation qu'ils nouent avec leurs personnages. Belen Rueda s'exprime ici avec une grande lucidité sur le processus d'identification avec le rôle qui se créé à la lecture du scénario d'une part et au tournage d'autre part, sans que cela signifie pour autant que l'acteur tente de se jouer lui-même. Elle confie qu'il n'est pas rare qu'un acteur tente d'utiliser un rôle pour exorciser ses propres tragédies, en l'occurrence la perte d'un être cher en ce qui la concerne. Enfin, la comédienne se révèle très philosophe lorsqu'elle livre ses considérations sur la notion de perte et/ou de disparition d'un être cher mais aussi sur la folie et la notion de réalité. Un entretien qui mérite réellement le visionnage, ne serait-ce que pour nous permettre de comprendre comment l'actrice a pu interpréter Laura avec autant de finesse.
Ce second disque se clôt sur une galerie de photos et une galerie d'affiches du film, auxquelles il faut ajouter les bandes-annonces promotionnelles (teaser espagnol, bande-annonce espagnole et française).
DVD 3
L'édition ultime nous offre près de deux heures de bonus supplémentaires dont le contenu s'avère surtout destiné aux plus cinéphiles d'entre nous. Nous débutons par le livret qui accompagne cette édition et nous poursuivrons par la galerie d'Entretiens une fois encore très fournis qui vient compléter celle du second disque sans faire de redite.
Livret
Ce coffret s'accompagne d'un superbe livret illustré d'une quarantaine de pages qui débute par un texte de Guillermo Del Toro à propos de Juan Antonio Bayona et de l'Orphelinat et se poursuit par un entretien avec le réalisateur lui-même autour du film, du scénario, du cinéma de genre ou encore du renouveau du cinéma fantastique espagnol. A partir de la seizième page, le livret se résume cependant surtout à des images : extraits de story-board, croquis préparatoires, photos dévoilant la conception des maquillages les plus impressionnants du film (celui de Tomas et celui du cadavre de Begnigna).
Juan Antonio Bayona et Belen Rueda à Paris (26mns52)
Réalisées à Paris lors de la promotion du film, ces interviews croisées offrent un contenu un peu plus classique que les autres mais n'en restent pas moins intéressantes à suivre. Bayona parle notamment de son travail avec le directeur de la photographie, et la manière dont il a voulu s'inspirer de l'ambiance visuelle de Rencontre du Troisième Type, tandis que Rueda revient sur le tournage de certaines séquences émotionnellement intenses et sur les coupes réalisées par rapport au scénario initial.
Guillermo Del Toro : L'échine d'un producteur (13mns51)
Cette interview en langue anglaise du producteur mexicain n'est nullement redondante avec ses interventions sur le second disque. Del Toro revient ici sur sa rencontre pour le moins singulière avec Juan Antonio Bayona, dont il a découvert les courts un peu par hasard (l'anecdote vaut son pesant d'or mais nous vous laisserons la découvrir par vous-mêmes). Il s'attarde aussi sur la mentalité conservatrice des producteurs, sur le style de Bayona et ses similitudes avec celui d'Amenabar (Les Autres), ou encore le talent de la comédienne Belen Rueda. Un entretien passionnant dans lequel ressort la volonté de l'auteur/producteur de faire découvrir de nouveaux talents en produisant un maximum de premier film.
Les influences croisées de J.A. Bayona (12mns18)
Cet entretien avec Juan Antonio Bayona s'attarde plus précisément sur les œuvres cinématographiques et littéraires qui l'ont inspiré, en provenance d'Espagne et des Etats-Unis principalement. Le cinéaste insiste surtout sur La Résidence de Narcisso Ibanez Serrador, dont il commente le style narratif, le décor ou encore l'utilisation du format cinémascope. Il fait aussi mention de nombreux classiques du cinéma d'épouvante, allant de La Malédiction à Carrie en passant par Rosemary's Baby. Enfin, le cinéaste revient sur les nombreuses références au conte de Peter Pan dans L'Orphelinat et sur la manière dont a été déterminé le titre du film. Un bonus qui parlera directement aux passionnés du cinéma d'épouvante.
L'Orphelinat : les sommets de la terreur (27mns37)
Les vingt premières minutes de ce supplément consistent en une conférence réalisée à l'Institut Cervantes à Paris en 2008. Loin de s'apparenter à une banale conférence de presse, cette table ronde réunissant Guillermo Del Toro, Juan Antonio Bayona, Belen Rueda et un certain Jorge Dorado (dont la fonction ne nous est pas présentée) s'avère être une passionnante discussion autour du genre du film d'horreur, à commencer par les notions même de l'horreur et de la terreur. Guillermo Del Toro se montre particulièrement intarissable quand il s'agit de défendre le cinéma qu'il aime et de rendre hommage aux films du genre subvertissant aux règles narratives habituelles - le cinéma de Lynch, de Polanski mais aussi l'horreur japonaise et coréenne. A ce titre, il parvient en quelques mots à résumer pourquoi les remakes américains de films asiatiques ou européens échouent systématiquement : ils tentent de tout expliquer là où les films d'origine restent ambigus.
Le second acte montre des images de l'avant première du film à Paris, une partie sympathique mais dispensable. Le bonus s'achève avec la remise des prix à Gérardmer 2008, dont le jury était présidé par Stuart Gordon.
Animatics
Juan Antonio Bayona a décidément accordé du temps à l'élaboration du DVD puisqu'il s'est donné la peine de commenter les animatics des quatre séquences présentées ici (La grotte, Dans la chambre, La cachette et les marionnettes).
Comparatif film/story-board
Juan Antonio Bayona et son scénariste l'ont confié à plusieurs reprises : l'une de leurs scènes préférées est celle de la séance de medium et il n'est pas étonnant que ce soit précisément celle-ci qui ouvre le bal dans ce comparatif film story-board par ailleurs classique. Les deux autres scènes concernées sont celles de la chasse au trésor et de l'apparition de Tomas.
Les essais de Simon (8mns47)
Ultime interview de ce DVD, et pas des moindres : celle du jeune acteur Roger Princep, interprète de Simon dans le film. Parallèlement, le réalisateur revient sur les méthodes qu'il a dû employer pour le diriger, le rôle du coach et éventuellement les difficultés rencontrées. Un bonus pas inintéressant compte tenu de la prestation étonnante du petit garçon (âgé de 5 ans au moment des essais) et dans lequel on ressent une fois encore à quel point Bayona aime ses acteurs.
Le film perdu (3mns50)
En guise de dernier supplément, nous avons droit à l'intégralité du film dans le film, à savoir la vidéo par Begnigna et découverte par Laura.