Sublime, sombre ou épique, les qualificatifs ne manquent pas pour définir Battlestar Galactica qui a en outre su baisser le rideau à l'apogée de sa gloire. Incontestablement, la série a remis la science-fiction au goût du jour en la sortant de son isolement geek pour devenir, au moins temporairement, un genre mature destiné à un public varié mais peu habitué aux vaisseaux spatiaux.

Mais une chose est certaine, la quatrième et ultime saison clôture l'histoire de manière définitive, un clap de fin sans rappel possible. Dans ces conditions, l'annonce d'un téléfilm supplémentaire avait à priori tout de l'arnaque grandeur nature, un film de mercenaires glosant et rajoutant des couches inutiles sur une histoire de toute manière connue et terminée. Et bien, la réponse est non, The Plan n'est pas une vulgaire escroquerie comme peut l'être toute la série des Saw depuis le second épisode. Loin (très loin même) d'être parfait, le film réalisé par Edward James Olmos (Amiral William Adama) a le mérite de porter un regard si ce n'est différent au moins approfondi sur les Cylons. Les autres héros de Battlestar Galactica.

 

 

 

The Plan, c'est avant tout l'histoire d'un titre mensonger. Un titre qui vous promet un plan machiavélique - tout le monde ayant en tête cette énigmatique phrase à la fin du générique « And they have a plan... » - concocté par des Cylons tous plus fourbes les uns que les autres et menant avec un rire sardonique l'humanité à sa perte. Prenant le contre-pied de ce qui était attendu, The Plan présente une action des Cylons bien erratique, franchement improvisée, rarement efficace et surtout sombrant progressivement dans le chaos au fil de la désagrégation de l'unité Cylon. Le spectateur y perd-il au change ? Pas si sûr. En revanche, il y a effectivement bien un « Plan » mais qui n'est pas celui escompté par le spectateur. Ce plan mène à un twist, mineur mais bien vu, éludé dans la scène finale que nous ne révélerons pas ici. Construit autour de la dualité grandissante de deux modèles de numéro 1 (l'excellent Dean Stockwell), frère Cavil sur le Galactica et le Cavil accompagnant la Résistance, The Plan s'efforce de proposer des personnages tout en subtilité et évoluant considérablement, ou pas mais c'est aussi ça l'intérêt, au fil des événements.

 

Si l'idée est intéressante, le monolithique personnage de numéro 1 étant majeur chez les Cylons, The Plan n'a dans les faits que deux heures pour mettre en avant tout le chemin parcouru par les deux Cavil là où les héros de la série eurent quatre saisons complètes. Pour remédier à ce problème de taille, les scénaristes ont tout simplement supprimé toute intrigue de fond pour se focaliser exclusivement sur les personnages. Partant du postulat que les spectateurs connaissent par cœur la série, le film recycle ainsi sans sourciller et à toute vitesse des moments clefs des deux premières saisons : L'explosion des réservoirs d'eau, l'attentat suicide de numéro 5 avec une ceinture d'explosifs, la compromission de Baltar par des photos truquées, la tentative de meurtre sur Adama... Sur une bonne moitié du film, toutes ces scènes présentées du côté Cylon s'enchaînent à une vitesse hallucinante et parfois maladroitement. Il en ressort un profond sentiment de déjà-vu mêlé à celui de la superficialité.

 

 

Pourtant, malgré cette accumulation de scènes éparses et la multiplication de personnages réduits à une apparition, Olmos parvient grâce aux scènes inédites à maintenir la ligne directrice de son film : La dualité entre les deux Cavil, prouvant par la même occasion que les Cylons transcendent la notion de simples clones. Les Cylons évoluent, ont des certitudes ou des doutes qui ne feront que s'amplifier au fil de leurs choix et de leurs interrogations. En un mot comme en cent, les Cylons cessent d'être des numéros et deviennent des individus responsables de leurs actes. Cette finesse dans le traitement des personnages est bien entendu l'une des marques de fabrique de Battlestar Galactica et que nous retrouvons avec plaisir ici.

En outre, de nombreuses scènes inédites réussies viennent dynamiser l'ensemble à commencer par la destruction spectaculaire des douze colonies, où les effets spéciaux sont très bons, et la naissance de la rébellion menée par Anders. Les histoires d'un numéro 4 (Rick Worthy) réuni avec sa famille humaine sur le vaisseau qu'il doit faire exploser et d'un petit garçon en quête d'une figure paternelle viennent par ailleurs apporter la dose nécessaire d'émotion tout en s'insérant habilement au récit. C'est simple, sobre, touchant et Olmos prouve par la même occasion qu'en vieux routard du cinéma et de la télévision qu'il est, il sait se servir d'une caméra et diriger des acteurs.

 

Très inégal et réservé exclusivement à ceux ayant déjà vu la série, The Plan a de quoi laisser quelques regrets, d'autant plus que quelques idées brillantes - la vision de Leoben de son futur avec Kara Thrace par exemple - ne sont qu'effleurées avant d'être mises de côté. Pourtant, si le spectateur accepte d'aller au-delà des défauts intrinsèques, le téléfilm réalisé par Edward James Olmos s'inscrit dans la complémentarité de la série Battlestar Galactica et s'impose comme un bon divertissement. Sans oublier bien entendu que la nostalgie fonctionnera à plein régime pour un nombre conséquent de fans... Enfin, il serait impossible de parler de The Plan sans évoquer la fabuleuse bande-son une nouvelle fois signée Bear McCreary.

 

Battlestar Galactica: The Plan est disponible en DVD et Blu-Ray depuis le 26 janvier.