Cello
Le 03/10/2007 à 20:21Par Elodie Leroy
Jusqu'à présent, le cinéma coréen a démontré que faire monter le trouillomètre n'était peut-être pas son fort, mais qu'il était tout de même capable de délivrer des films utilisant habilement les codes du genre pour raconter tout autre chose, souvent dans le registre du drame humain. C'était le cas dans de jolies surprises telles que Deux Sœurs (Kim Jee-Woon), Apparitions (Lee Soo-Yeon) ou encore The Wig (Won Shin-Yeon), qui utilisaient le format du thriller d'épouvante pour explorer les dysfonctionnements familiaux ou les tourments de l'âme. Réalisé la même année que The Wig et que le sympathique Red Shoes, Cello s'inscrit dans la même lignée. Compte tenu du concept de départ, celui d'un violoncelle dont l'arrivée sème le trouble dans une famille en faisant resurgir le passé d'une femme, on n'attendait pas nécessairement de la part du réalisateur Lee Woo-Cheol qu'il nous livre dès son premier film une expérience révolutionnaire. Malheureusement, non seulement Cello n'innove en rien, mais il ne parvient pas à égaler les références coréennes du genre, la faute à un scénario peut-être trop ambitieux et au final peu convaincant.
Reconnaissons cependant que l'on se laisse volontiers captiver par l'atmosphère sombre et musicale de ce métrage dont le générique du début fait belle impression. Soutenu par un travail soigné sur la photographie et une bande son inquiétante, Cello prend parfois les allures d'un huis clos, le décor de la maison se voyant joliment exploité le temps de quelques scènes même si l'on eut espéré davantage de poésie visuelle lors des interventions de la musique. Si le réalisateur échoue à faire du violoncelle un personnage à part entière, il opère toutefois une belle tentative de dresser le portrait d'une famille en crise dont les préoccupations tournent autour de leur fille autiste. La comédienne Sung Hyun-Ah (La Femme est l'Avenir de l'Homme, Time) suscite sans mal l'empathie pour son personnage, Mi-Ju, et cela en dépit du caractère peu aimable de cette dernière. Ainsi, la déception est grande lorsque surviennent les inévitables révélations sur le passé de Mi-Ju, dont les enjeux profonds s'avèrent en fin de compte peu crédibles voire un peu ridicules au vu de la vengeance terrible qui s'abat sur elle. A ce titre, si le genre de l'horreur permet de mettre en scène des faits particulièrement sordides (Apparitions venait en témoigner avec ses infanticides, ou encore Red Shoes avec son final assez trash), encore faut-il que ces derniers soient habilement amenés afin de ne pas paraître gratuits. Or, la gratuité est un peu le travers dans lequel tombe Cello dans sa dernière partie, d'une cruauté inouïe envers l'héroïne, au point de provoquer finalement le détachement émotionnel - soit la réaction inverse de celle qui était escomptée.
A l'issue d'un récit parsemé d'ellipses, au point que l'intrigue n'est pas toujours très claire, Lee Woo-Cheol essaie de se raccrocher aux branches à travers un dénouement malin. Mais une pirouette ne suffit pas à crédibiliser cette histoire qui ne va finalement pas plus loin que la vengeance d'un fantôme particulièrement mal luné. On aurait presque aimé que Lee Woo-Cheol se montre moins ambitieux quant à la profondeur de son histoire et développe davantage la dimension horrifique, un aspect dans lequel il ne s'en sort finalement pas trop mal. Car Cello possède en fin de compte de belles qualités formelles et bénéficie d'un rythme suffisamment soutenu pour se laisser suivre sans ennui. Si le fond n'avait pas été aussi indigent et maladroit, l'expérience aurait été des plus plaisantes.