Poulet aux Prunes
Le 20/09/2011 à 22:55Par Maxime Chevalier
Notre avis
POULET AUX PRUNES : LA CRITIQUE
Le succès tant public qu'artistique de Persepolis (un million d'entrées, deux Césars et un prix à Cannes) devait forcément conduire Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud (alias Winshluss) à de nouveau collaborer ensemble. Second film, seconde adaptation d'une bande dessinée signée de l'auteure d’origine iranienne mais première incursion dans le cinéma live avec des comédiens en chair et en os. Avec Poulet aux Prunes, le tandem délaisse les sentiers autobiographiques de Persepolis pour embrasser une narration proche du conte. Un projet plus ambitieux donc, c'est peu dire que nous attentions Poulet aux Prunes au tournant.
1958, en Iran. Puisque plus aucun violon ne peut lui procurer le plaisir de jouer, Nasser Ali Khan (Mathieu Amalric) décide de se laisser mourir. Huit jours plus tard, Nasser est enterré. Tous ceux qui l’aimaient étaient présents ce jour-là... Pendant huit jours, Nasser, cloîtré dans son lit, se remémore sa vie, toute entière consacrée à la musique. Si le sujet du film a tout du drame cafardeux, le duo désamorce rapidement la chose par une fantaisie rafraîchissante. A l'instar de la bande dessinée dont il est adapté (auréolé du prix du Meilleur album au Festivald'Angoulême de 2005), Poulet aux Prunes affiche une mise en scène sacrément plus élaborée que Persepolis.
POULET AUX PRUNES : UNE SOIF DE CINÉMA
Tout le challenge du passage du dessin animé au cinéma live résidait dans la transformation (et non la transposition) de l'épure du trait en une image cinématographique. Pour y parvenir, les deux dessinateurs-réalisateurs ne s'interdisent aucune rupture de tons et font appel à des genres et des techniques empruntant aux différents registres du cinéma aussi variés que le mélodrame (les retrouvailles de Nasser et son amour sous un arbre devant un soleil couchant), le fantastique (l'apparition de l'ange de la mort Azraël), la comédie (l'énumération des différentes façon de se suicider, le futur du fils de Nasser conté sous la forme du sitcom) en passant par l'expressionnisme ou encore l'animation. Une véritable soif de cinéma qu'on retrouvait également dans Gainsbourg (vie héroïque), biographie tout personnelle signée Joann Sfar, venu lui aussi de la BD.
Malgré son inventivité constante et toutes ses évidentes qualités plastiques, Poulet aux prunes demeure, à de rares scènes près, figé. Trop appliqué à la recréation plastique des planches, Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud manquent de peu d'étouffer leurs personnages sous une profusion de trouvailles poétiques mais oublient d'aider le film à trouver sa respiration. A trop en faire, Poulet aux Prunes souffre des mêmes écueils que le premier essai live de Sfar mais n'a aucune raison de rougir au milieu du paysage sclérosé du cinéma français.