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L'Oeuf

Le 29/03/2008 à 14:02
Par
Notre avis
2 10

De par sa thématique universelle et sa dimension introspective, L'œuf aurait pu être une oeuvre bouleversante, et cela en dépit de la lenteur extrême du montage. Malheureusement, et en dépit de qualités visuelles indéniables, à commencer par un sens aigusé de la composition de l'image, la léthargie ambiante finit inéluctablement par contaminer le spectateur, lassé d'assister à des plans de deux minutes où il ne se passe rien, où le visage des comédiens ne change pas d'un iota. Par maladresse ou peut-être par excès de prétention de la part de l'auteur, l'émotion est pour ainsi dire tuée dans l'œuf.


Critique L'Oeuf

Critique L'Oeuf

 

 

On aurait aimé s'extasier devant le retour aux sources de cet homme endeuillé par la récente mort de sa mère. On aurait aimé ressentir à quel point il l'a aimée, percevoir sa culpabilité de ne pas avoir été présent à ses côtés pendant ses derniers instants. On aurait aimé sentir planer la présence de cette mère, s'imprégner de l'atmosphère du village natal de Yusuf (Nejat Isler), deviner cette connexion intime qui relie les êtres avec la terre sur laquelle ils ont grandi. Malheureusement, rien de tout cela n'aboutit dans L'œuf que l'on pourrait résumer à une succession de rendez-vous manqués. Sur le papier, pourtant, ce troisième long métrage de Semih Kaplanoglu promettait monts et merveilles, avec sa thématique universelle et son caractère introspectif. D'autant plus que sur le plan artistique, le film tient la dragée haute. On remarque ainsi dès les premières minutes de bobine à quel point il tient à cœur au cinéaste de composer chaque plan, de soigner chaque mouvement de caméra. Le travail réalisé sur la photographie et sur les décors s'avère à ce titre remarquable, les tons de couleur ocre se voyant constamment équilibrés par une touche de bleu plus ou moins marquée, ce qui confère à l'œuvre une identité visuelle et une dimension picturale séduisantes.

Critique L'Oeuf
La lenteur extrême d'un film ne constitue pas un défaut en soi et peut même, dans certains cas, participer à installer une véritable atmosphère - en témoigne le cinéma d'un cinéaste inspiré tel que Apichatpong Weerasethakul (Syndromes and a Century). Encore faut-il que cette lenteur ne confine pas à l'absence totale de gestion du rythme et que les images aient quelque chose à raconter, à défaut d'être accompagnées de dialogues. Dans L'œuf, on assiste à des plans avoisinant parfois les deux minutes sans qu'il ne se passe rien à l'écran, sans que les visages des comédiens ne laissent apparaître le moindre changement d'expression. Maladresse ou parti pris artistique pompeux ? Une chose est sûre, la léthargie ambiante s'avère bien vite contagieuse pour le spectateur. Avec le peu que les scénaristes lui ont donné, le comédien Nejat Isler fait de son mieux et parvient bien à transmettre quelques émotions par-ci par-là (la scène de l'évanouissement, la scène du chien), le cheminement intérieur de Yusuf se révélant en fin de compte très crédible. En revanche, les rencontres de l'homme ne sont guère enthousiasmantes, à commencer par Ayla (Saadet Isil Aksoy), aussi expressive que les fourneaux devant lesquels elle passe le plus clair de son temps.

On ne doutera pas de la sincérité de l'entreprise, mais le film reste bien trop embourbé dans un immobilisme frisant la froideur pour convaincre. Au final, L'œuf aurait peut-être pu faire un beau court métrage. On attendra bien sûr les deux opus suivants de la « Trilogie de Yusuf », Lait et Miel, pour se prononcer définitivement sur l'ensemble du projet.






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