Les Grands Frères

Nos lecteurs les plus fidèles savent à quel point nous adorons Judd Apatow. Et en bon fans de base, quand nous avons vu débarquer sur nos écrans un film intitulé Les Grands frères, avec Paul Rudd et le petit McLovin de Supergrave (Christophe Mintz-Plasse), nous ne pouvions pas passer à côté. Mais quelle ne fut pas notre surprise lorsqu'en découvrant la liste du cast & crew, nous nous sommes rendus compte que le nom du gars Apatow n'apparaissait nulle part. Même pas dans les crédits des producteurs exécutifs ! Les Grands frères serait-il le premier "Apatow-like" (ou "patapato" comme on dit chez nous - pour plus d'explications, cliquez ici) officiel de l'histoire ? La réponse est affirmative, à 100%. Et franchement, on est bien content que le cinéma du bonhomme ait fait école, tant il est à ce jour le seul à avoir réussi à cerner la psychologie des 15-30 ans d'aujourd'hui de manière juste et sincère.

Les Grands frères, c'est l'histoire de deux mecs qui comprennent qu'ils sont en train de passer à côté de leur vie. L'un parce qu'il est toujours coincé dans un délire d'étudiant du spring break, l'autre parce qu'il s'enfonce progressivement dans une misanthropie dépressive qui l'empêche d'apprécier quoique ce soit dans sa petite existence. Au contact de deux enfants (un petit de 10 ans plus grossier qu'un matelot Irlandais et un adolescent timide dont le seul plaisir est de participer à des conventions de GN), ces deux adultes se rendront compte de ce qu'ils doivent accomplir pour finalement être heureux. A partir d'un tel pitch, le film de David Wain aurait très bien pu être un drame poussif, dans la lignée des fausses productions indépendantes de Fox Searchlight. Que nenni, nous sommes bien là en présence d'une comédie, une vraie, qui arrive à ne jamais tomber dans le lourdingue, grâce à des comédiens très bons (Paul Rudd à mourir de rire, Jane Lynch en impro totale, et même Seann William Scott, dont les délires régressifs "Stiffler-iens" servent totalement le propos du film) mais aussi un sous-texte et une morale pleins de pertinence.

Sans vouloir trop en dévoiler, il faut bien admettre que la fin du film nous a laissés assez admiratifs. Alors que vers la moitié du métrage, on voyait déjà se pointer une conclusion portée par une bonne morale pleine de bons sentiments sur la signification profonde de ce qu'il faut être pour faire un bon adulte, David Wain prend tout le monde à contre-pied. Dans une séquence anthologique d'une quinzaine de minutes, tous les enjeux du scénario se règlent de manière purement puérile et totalement jouissive. Un final qui fait franchement plaisir à voir, et qui mérite à lui seul la découverte de ces Grands frères là, le portrait d'une jeunesse attardée, née dans les années 80, qui préfère se foutre sur la gueule avec des épées en mousse déguisé en Paul Stanley ou en Elfe de Rivendell, plutôt que d'aller témoigner à un procès. La phrase que l'on retiendra du film : Paul Rudd qui lance à Christopher Mintz-Plasse "Ne laisse jamais personne te dire ce que tu dois être." Elle est là la morale du film. Grandir ! Pour quoi faire ? Pour être comme tous les autres ?

Les Grands frères, ou la revanche des "loosers qui ratent leur vie" du Cyprien d'Elie Semoun. Les Grands frères, It's geek against the world, and the world is losing...