Millenium 3 : La Reine dans le Palais des Courants d'Air
Le 19/07/2010 à 08:37Par Elodie Leroy
Dernier acte de la trilogie Millenium, La Reine dans le Palais des Courants d'Air se situe directement dans la lignée du précédent et lève le voile sur les activités top secrètes qui conditionnent le destin de Lisbeth Salander. Si le film de Daniel Alfredson parvient à restituer l'intrigue d'espionnage dans toute son ampleur avec une réelle efficacité scénaristique, l'histoire passe une fois encore à côté de la critique sociale de Stieg Larsson et n'hésite pas à trahir certains personnages secondaires. On déplorera de ne trouver dans cette adaptation qu'un simple divertissement mais on saluera tout de même le suspense haletant et la prestation de Noomi Rapace dans le rôle fascinant de Lisbeth Salander.
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Critique Millenium 3 : La Reine dans le Palais des Courants d'Air
Succès retentissant dans le monde entier, Millenium de Stieg Larsson s'est écoulé à près de dix millions d'exemplaires vendus à travers le monde, dont près de 3 millions en France. Le premier volet de l'adaptation cinématographique nous avait laissés des sentiments partagés mais le second nous avait agréablement surpris par son écriture plus maîtrisée et sa mise en scène qui à défaut d'être inspirée, pouvait s'enorgueillir d'une efficacité des plus plaisantes et d'une ambiance un peu plus soutenue. On lui reprochait cependant de passer à côté du propos de Stieg Larsson sur la mainmise des grands groupes industriels sur la presse économique suédoise mais aussi sur les violences contre les femmes. Dernier volet de la saga filmique, La Reine dans le Palais des Courants d'Air ne déroge pas à la règle : Daniel Alfredson signe un polar bourré de suspense mais qui n'explore une fois encore que superficiellement les thématiques du roman.
Dans La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette, l'histoire mettait Lisbeth Salander dans une situation critique puisqu'elle était accusée à tort des meurtres de son tuteur Nils Bjurman et de deux journalistes. Devenue fugitive, la jeune femme était parvenue à retrouver la trace d'Alexander Zalachenko - alias Zala - et du géant blond qui avait entre temps agressé son amie Myriam. Mais au cours de cette lutte acharnée, elle avait reçu une balle dans la tête et s'en était tirée de justesse, avant d'être secourue par Mikael Blomkvist. Dans le troisième chapitre, Lisbeth Salander est transportée à l'hôpital et si ses blessures prennent rapidement le chemin de la guérison, elle est loin d'être blanchie et doit se préparer à passer devant un tribunal. Dans la continuité directe du second volet, La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette utilise l'histoire personnelle de son héroïne pour mettre en lumière des activités classées secret défense au sein de la Sapo, le service de sûreté suédois. Au cours de son enquête, Mikael Blomkvist découvre au sein de ce dernier l'existence d'un groupe de criminels qui se nomme lui-même la "section spéciale".
Si les deux précédents s'articulaient autour d'une enquête policière, ce troisième opus dévoile toute la mesure des ambitions de la saga Millenium en tant qu'histoire d'espionnage. Comme on s'en doute, l'intrigue a été épurée, voire simplifiée, mais le lecteur des romans retrouvera les mécanismes complexes qui faisaient tout l'intérêt du troisième tome. Là où le bât blesse, c'est dès lors que l'on s'intéresse aux différents protagonistes. Si l'acteur Mikael Nyqvist finit par se faire accepter dans le rôle de Superblomkvist et se montre plutôt convaincant dans l'intensité, il n'en va pas de même pour tous les personnages qui l'entourent. Occulter les conflits entre les policiers Sonja Modig et Hans Faste est une chose, même s'il s'agit de l'un des nombreux points scénaristiques dénonçant le machisme à être évacué dans les films. Oublier l'existence de la sœur jumelle de Lisbeth en est une autre. Mais on ne pardonnera pas les changements radicaux effectués sur le personnage d'Erika Berger. N'y allons pas par quatre chemins : on peut bel et bien parler de trahison dans ce cas précis ! Dépouillée de toute son histoire personnelle, ce qui lui fait perdre tout son intérêt, la patronne de Millenium se transforme aussi en poltronne, là où le personnage du roman laissait le souvenir d'une battante.
Ce triste constat réalisé, le traitement de Lisbeth Salander demeure une réussite jusqu'au bout, non seulement grâce à la prestation irréprochable de Noomi Rapace, dont le jeu intériorisé colle parfaitement à son rôle, mais aussi grâce à la mise en scène du procès de la jeune femme, l'un des temps forts du film et de la trilogie. L'action n'est pas laissée de côté puisque la dernière confrontation entre Salander et son demi-frère vaut elle aussi le détour, de par sa violence sèche dénuée de fioritures. Dommage une fois encore que la thématique féministe du roman ait été considérablement atténuée car si les initiés s'y retrouveront, ceux qui visionneront le film sans avoir lu les romans passeront en partie à côté de la richesse du personnage.