The Artist
Le 01/06/2011 à 17:55Par Matthieu Morandeau
Véritable pari de metteur en scène, le film de Michel Hazanavicius est une vraie réussite à tous les niveaux. Constamment dans l'hommage, la citation et la référence depuis le culte La Classe Américaine jusqu'à l'hilarant OSS 117 : Rio ne répond plus, le cinéaste ne déroge pas à la règle avec The Artist, mais il transcende ici littéralement son sujet et son concept pour nous offrir un spectacle exceptionnel, drôle, risqué, ambitieux, intimiste et parfaitement maîtrisé. Assurément l'un des meilleurs films de la compétition cannoise 2011. Découvrez ci-dessous la critique de The Artist.
CRITIQUE DU FILM THE ARTIST
Avec The Artist, Hazanavicius a choisi de rendre hommage à tout un pan du cinéma hollywoodien qu'il admire, de l'Age d'or du cinéma muet jusqu'à l'apparition du cinéma parlant. Ainsi, son film est entièrement muet (ou presque) et en noir & blanc, le format 1,33 de l'époque est respecté, les intertitres intelligemment placés, la bande-son orchestrale omniprésente et séduisante... Un exercice de style totalement maîtrisé et bluffant, soutenu par une interprétation sans faille de l'ensemble du casting. Si John Goodman est excellent en producteur-cliché Hollywoodien et Bérénice Béjo irrésistiblement belle et touchante, c'est véritablement Jean Dujardin qui explose à l'écran. Hilarant, émouvant, brillant, le comédien incarne George Valentin : l'archétype de la star du cinéma muet tel que Hollywood l'avait conçue dans son âge d'or. Un savoureux mélange entre Douglas Fairbanks et Buster Keaton, avec une pointe de Cary Grant pour le style. Derrière une moustache soignée, un sourire éclatant et une certaine élégance naturelle, Dujardin (récompensé à Cannes) interprète un personnage profond et ambitieux, dont l'orgueil et le manque de lucidité lui coûteront sa carrière.
Car The Artist raconte en effet le parcours croisé de deux stars hollywoodiennes: la chute d'un artiste et l'ascension d'une jeune première, dont le cinéma parlant fera son égérie. Entre Une étoile est née de George Cukor et Chantons sous la pluie de Stanley Donen, l'histoire du film est finalement assez simple et standardisée, typique des long-métrages de l'époque. L'intérêt est plutôt dans le travail de mise en scène accompli, nostalgique et bourré de références. Les cadres sont complexes et recherchés (parfois même trop, ne respectant pas toujours les contraintes techniques de l'époque) et le découpage précis... Et Hazanavicius ne cache pas sa cinéphilie en multipliant les clins d'œil à Orson Welles, Alfred Hitchcock, Charlie Chaplin, Buster Keaton... The Artist accumule alors les bonnes idées, jouant parfois sur le son (la scène du rêve), l'utilisation des intertitres (la fin), le montage (l'irrésistible ascension de Peppy Miller) ou les mises en abîmes habiles (le premier tournage, le film d'aventure que réalise George Valentin). Le cinéaste maîtrise tout et le résultat est terriblement convaincant. La générosité et la sympathie du cinéaste et de son "bébé" transparaît réellement à l'écran et on imagine très bien toute l'équipe s'amuser comme des fous durant le tournage. Riche et inspiré, le long métrage de Michel Hazanavicius est un film ambitieux qui permet au spectateur de découvrir ou redécouvrir la beauté et l'émotion du cinéma muet, oublié depuis longtemps par le grand public. Aussi bien trip nostalgique que brillant exercice de style, The Artist est avant tout un grand film, un vrai. A voir absolument.