Yves Saint Laurent – Pierre Bergé, l'amour fou

Critique Yves Saint Laurent – Pierre Bergé, l'amour fou

Le pari de Pierre Thoretton était osé : réaliser un documentaire sur la relation entre Yves Saint Laurent et Pierre Bergé, soit deux figures emblématiques de leur époque liées par l'amour et le travail. D'abord connu comme le successeur de Christian Dior, Yves Saint Laurent rencontre Pierre Bergé en 1958. C'est le début d'un amour fou mais aussi d'un projet commun, la maison de couture qu'ils fondent trois ans plus tard. Tandis que Pierre Bergé se démène pour mener l'entreprise vers le succès, Yves Saint Laurent brille de mille feux à travers ses créations et sa personnalité hors normes, avant de sombrer dans la dépression et de se perdre dans les affres de la création.

Si le film s'appuie sur un impressionnant travail de recherche d'archives photographiques et vidéo, Yves Saint Laurent - Pierre Bergé, l'amour fou ne constitue pas pour autant une biographie à part entière du célèbre créateur mais plutôt un témoignage, celui de Pierre Bergé, qui retrace à travers un long entretien ses cinquante ans de vie commune avec son amant. Tandis que la caméra s'introduit dans l'appartement des deux hommes et leur maison à Marrakech, c'est par sa démarche résolument subjective que le film parvient à atteindre une certaine vérité et à susciter l'émotion, sans jamais tomber dans le pathos ni dans le culte de la personnalité. Au final, les deux amants apparaissent dans toute leur complexité cependant que leur amour prend une dimension tragique.

Traversé par des moments de grâce, Yves Saint Laurent - Pierre Bergé, l'amour fou n'est tout de même pas exempt de quelques petites baisses de rythme, l'accumulation de documents photographiques conférant à l'œuvre un statisme parfois dommageable. On eut aussi aimé envisager avec davantage d'acuité le rapport des deux hommes à leur époque, sachant à quel point leur relation pouvait - et peut encore à l'heure actuelle - apparaître subversive. Le film a toutefois le bon goût d'entretenir une certaine simplicité formelle, laissant tout le loisir à son intervenant principal de se livrer avec une lucidité, une sincérité et une tendresse émouvantes.