A Cure For Life : le cauchemar de Gore Verbinski et Dan DeHaan - interview
Le 17/02/2017 à 13:19Par Veronica Sawyer
Après le décrié Lone Ranger et 15 ans après le Cercle - The Ring, Gore Verbinski cherche à nouveau à nous faire peur. L'inventif A Cure For Life marquera les spectateurs qui auront la bonne idée de le voir en salles.
Le réalisateur des trois premiers Pirates des Caraibes plonge Dan DeHaan (Chronicle, The Amazing Spider-Man, bientôt Valérian), jeune trader ambitieux, dans un mystérieux institut implanté dans un château en Suisse. Cette cure cache des pratiques occultes et maléfiques qu'il va découvrir à ses risques et périls ainsi qu'une énigmatique jeune fille (Mia Goth)...
A Cure For Life est un conte horrifique inventif, visuellement superbe, bourré de twists qui enchanteront les amateurs de sensations fortes et ceux qui aiment être surpris au cinéma.
On a eu l'occasion d'en discuter avec Gore Verbinski et Dan DeHaan. Voici des extraits de ces deux rencontres.
1- GORE VERBINSKI - réalisateur
Comment décriveriez-vous A Cure For Life ?
Comme un film gothique moderne. On emmène un personnage très moderne dans un lieu ancien. Il arrive avec ses perspectives, sa dépendance aux ordinateurs, au téléphone, et va se rendre compte de la maladie qui ronge notre époque. J’espère que la vision de A Cure For Life provoquera des effets secondaires. Que trois jours après avir quitté le cinéma, les spectateurs y penseront encore. Ce film nous parle d’une certaine manière et nous montre les défaillances de notre civilisation.
D’où vous est venue cette envie de tourner A Cure For Life ? Après quelques énormes blockbusters, vous aviez besoin d'un projet différent et moins onéreux ?
Oui. J'ai toujours aimé des films comme Ne vous retournez pas de Nicolas Roeg, le Locataire de Roman Polanski et bien sûr The Shining de Stanley Kubrick. On sait que quelque chose de différent est en train de se passer en les regardant. Il y a des forces invisibles qui poussent les personnages principaux vers leur épiphanie. Comme si une main dans les ténèbres les guidaient. Justin le scénariste et moi avons imaginé cette histoire comme une maladie, comme si une force en action poussait vers l'inévitable.
De quoi vous inspirez vous ?
De beaucoup de choses. Par exemple, j’ai eu une rage de dent sur le tournage alors que l'on était en Suisse. J'ai fait appel à un dentiste allemand. Il est venu s'occuper de moi avec son masque et sa fraiseuse. C'était étrange. J'en rêve encore et j'ai utilisé ce souvenir pour torturer le personnage de Dan DeHaan (sourires).
Alors que la moindre bande-annonce actuelle dévoile la trame intégrale d'un film, celle d'A Cure For Life joue le mystère.
Oui on en voulait une de différente. En même temps, ce film n’est pas résumable en quelques minutes. Il s’y passe trop de choses. Il est énigmatique. C’est une forme de cauchemar. Toutes les questions soulevées n'ont d'ailleurs pas forcément de réponses. Le marketing actuel du cinéma a été conçu pour vendre un certain type de films. Nous nous situons en dehors des critères habituels. Ce qui est excitant et en même temps un peu flippant. Mais je suis ravi d'avoir pu tourner un film qui ne correspond pas aux goûts de tous J'espère qu'après A Cure For Life, les gens ne verront plus les spa et les cures thermales de la même manière (rires).
Quel a été le dernier film qui vous ait marqué ?
The Lobster. Je le trouve incroyable. Il a été mon film préféré de 2016.
Qu’en est-il de votre adaptation du jeu vidéo Bioshock annoncé il y a quelques années ?
Le film a été annulé quelques semaines à peine avant le début du tournage. Il allait être Rated-R (interdit aux moins de 17 ans non accompagnés aux Etats-Unis). Je voulais qu’il soit sombre et violent. On avait imaginé tout un monde et il allait coûter cher. Mais Universal n’était pas prêt à mettre autant d’argent dans quelque chose qui leur paraissait alors risqué. A cette époque, les films Rated-R ne fonctionnaient pas au box-office. Cela a été très dur de se voir interrompu à quelques semaines du tournage après avoir travaillé des années dessus. Aujourd’hui, les choses ont changé. Les films Rated-R redeviennent dans l’ère du temps. Mais je ne saurais dire si BioShock verra le jour.
2 - DAN DE HAAN - acteur
Etes-vous amateur de films d’horreur ?
Je suis fan des classiques de l’horreur. Comme The Shining, Rosemary’s Baby, Damien la Malédiction, le Locataire, Fenêtre sur Cour. Je le suis moins des productions récentes que je ne vais pas voir au cinéma. Les films que j'ai cité et que Gore m'a demandé de regarder avant le tournage méritent leur légende. Leur peur est travaillée, réfléchie. Ce n’est pas une terreur ordinaire mais une terreur plus sournoise qui reste avec toi après le générique de fin. C’est ce que l’on vise avec Cure For Life.
Vous êtes malmené tout au long du film. Quelles ont été les scènes les plus difficiles à tourner ?
Celles sous l’eau. J’ai dû tourner deux semaines dans une cuve remplie d’eau. J’étais épuisé. J’étais attaché avec un harnais afin que mon corps reste horizontal et je devais respirer à travers un tube à oxygène. Je n’avais rien pour me protéger le nez ou les yeux. C’était très intense et très difficile physiquement. Etre un acteur peut être très physique.
N’était-ce pas étrange de tourner un film comme Cure For Life avec un réalisateur qui s’appelle Gore et une actrice qui s’appelle Goth (Mia Goth sa partenaire à l'écran) ?
Si bien sûr (rires). J’y ai pensé. Gore a un sacré bon prénom pour réaliser ce genre de film. Il était né pour ce poste.
Parmi tous les films que vous avez tourné, quel est celui qui a, selon vous, était le plus important ?
C’est dur à dire. J’ai fait une série télé appelé In Treatment (2010). C’est ce qui m’a ouvert la porte au cinéma. Sans cette série, je n’aurai pas été dans des films.
Quels étaient vos héros adolescent ?
J’adorai et j’adore toujours Philipp Seymour Hoffman, Al Pacino, James Dean. Ce sont mes trois favoris.
Vous êtes d'ailleurs souvent comparé à James Dean.
Oui. Il y a pire comme comparaison (rires).
Quels souvenirs conservez-vous du film de Metallica : Through The Never dans lequel vous tenez le rôle principal ?
J’étais fan du groupe sans être un fan hardcore. Mais quand Metallica t’appelle pour te proposer de tourner un film, c’est indéniablement cool. J’ai passé deux semaines avec eux à Vancouver et cela a été deux semaines bien sauvages. C’était une expérience très différente de mes autres films.
Avez peur peur des anguilles ? Vous avez eu droit à quelques scènes en leur compagnie.
Oh oui. Les anguilles sont flippantes. J'en ai peur. Certaines ont été ajoutées en post prod et d’autres étaient vraies. Mais je ne recule jamais devant la difficulté quand un scénario me plait. Je recherche le défi. C’est ce qui est excitant. C’est ainsi que l’on progresse dans ce métier.
Que pouvez-vous nous dire de Valérian de Luc Besson qui sort cet été ?
C'est un blockbuster original. La plupart des grosses productions dans le genre n'ont pas ça. Elles sont toutes formatées et frileuses à l'idée de prendre des risques. En étant pas associé à un studio américain, Valerian a pu se nourrir de son originalité et développer une vie qui n'appartient qu'à lui. Un film dans une franchise aux Etats-Unis ne pourrait pas avoir cette liberté. Il y a trop d'intervenants qui veulent imposer leur conception du projet. Je me suis tellement amusé lors du tournage de ce film. J'espère que les gens qui le verront s'amuseront tout autant. Attendez-vous à être surpris.