Si le master HD du film de Federico Fellini n’est pas aussi éclatant que d’autres titres de la collection, force est d’admettre que cette copie permet de redécouvrir Et vogue le navire… dans de très belles conditions techniques. En premier lieu, la restauration est encore une fois admirable et rares sont les tâches et griffures subsistantes. Evidemment, les scories présentes lors de la première séquence en N&B sont d’origine pour donner un effet film muet. Le passage à la couleur offre de belles gammes de bleus ainsi qu’un joli relief des matières, mais les visages demeurent étonnamment blafards et le grain est parfois plus ou moins appuyé. Si la copie est claire, les fourmillements limités (merci à l’encodage AVC) et les contrastes soignés, la définition manque de temps à autre d’homogénéité. En revanche, le transfert est tellement immaculé que les toiles de fond représentant l’océan sont visibles comme l’œil au milieu de la figure…ce qui n’aurait pas déplu au maestro qui voulait à tout prix éviter le réalisme. Dernière chose, les nombreuses séquences sombres sont finalement les plus belles de ce master HD avec un piqué étonnamment plus aiguisé ainsi qu’un apport HD plus flagrant quant à la gestion de la saturation des couleurs.
En dépit d’un léger souffle sporadique, les deux mixages français et italien DTS HD Master Audio 2.0 ont subi un sacré lifting et demeurent dynamiques tout du long. Les quelques séquences chantées frôlent parfois la saturation mais l’écoute demeure limpide, propre, et les dialogues sont aussi efficaces en italien qu’en français. La séquence d’ouverture muette caractérisée par le seul bruit d’un appareil de projection est d’une clarté confondante, tandis que les scènes musicales profitent d’une très belle ouverture des enceintes. Quelques passages notamment celui se déroulant dans la salle des machines, parviennent à tirer leur épingle du jeu et prouvent le soin tout particulier apporté au maestro quant au moindre effet sonore de son film.
L’imagination au pouvoir (22min02)
Scénariste et proche collaborateur de Federico Fellini (mais aussi de Francesco Rosi, Michelangelo Antonioni), Tonino Guerra livre ici un témoignage intime sur "il maestro" mais dresse aussi et surtout un portait d’homme singulier et attachant de Federico Fellini. Il revient également longuement sur la genèse du film, sur leur collaboration, sur le processus créatif du réalisateur mais aussi sur la vie de ce dernier en dehors des plateaux. Débordant d’anecdotes inédites toutes aussi passionnantes les unes les autres liées à la production de Et vogue le navire... (le casting, les décors, les thèmes), ce segment se révèle aussi instructif qu'indispensable pour les fans du maestro. Il est cependant dommage que les propos soient trop entrecoupés par les images tirées du film.
L’art du faux-semblant (14min18)
C’est au tour du directeur de la photographie Giuseppe Rotunno d’évoquer sa collaboration avec Federico Fellini. Adjoint attitré du cinéaste italien, le chef opérateur ne manque pas lui aussi d’anecdotes liées au tournage de Et vogue le navire... et ses propos complètent parfaitement ceux de Tonino Guerra entendus dans le segment précédent. Giuseppe Rotunno était l’un des rares collaborateurs de Federico Fellini à participer au film en amont afin d’adapter son travail à celui des autres associés (dialoguiste, décorateur) du réalisateur. Le point central de cet entretien tourne autour du désir du metteur en scène à filmer des décors qui ne devaient en aucun cas paraître réalistes, contrairement à d’autres cinéastes tel que Luchino Visconti ou Michelangelo Antonioni. Comme l’indique Giuseppe Rotunno, Federico Fellini lui imposait de rendre évident l’aspect falsifié des toiles de fond ou, comme c’est le cas dans Et vogue le navire..., la fausse mer caractérisée par une bâche en plastique. Enfin, le film fut entièrement tourné dans les studios Cinecitta à Rome, monopolisa 8 plateaux, 40 décors, 120 acteurs et des centaines de figurants
Invitation au voyage (23min18)
Ce dernier portrait de Federico Fellini apparaît plus modéré que les précédents. Compositeur et conseiller musical sur Et vogue le navire…, Gianfranco Plenizio se penche à son tour sur sa participation au film de Federico Fellini, mais dresse un portrait en demi-teinte du cinéaste qu’il n’hésite pas à qualifier de génie capricieux. Notre interlocuteur évoque les rapports hésitants entre haine et mépris du maestro avec la musique qui le rendait méfiant et surtout nerveux, en raison dit-il de son hyper-émotivité. Dans une première partie, Gianfranco Plenizio décrit la place de la musique dans Et vogue le navire… ainsi que la façon dont il a pu imposer quelques unes de ses idées. Il y aborde également la phase de la postsynchronisation, élémentaire chez le réalisateur et qui a voulu pour ce film un décalage notable dans le doublage afin de rendre hommage aux films d’antan. Il clôt cet entretien en partageant quelques anecdotes montrant le côté arrogant, extravagant et souvent instable de Federico Fellini, qui aimait houspiller ses assistants devant tout le monde, et qui finissait par aller s’excuser auprès d’eux en privé.
L'interactivité se clôt sur la bande-annonce (1min39).