On ne sait pas où l'éditeur a dégotté ce master mais force est de constater que la copie a pris un sacré coup de vieux. Certes le film était jusqu'à présent inédit en DVD (et même en vidéo) mais dès l'apparition du logo 20th Century Fox, le N&B apparait brumeux, de nombreuses scories émaillent l'écran, il manque visiblement quelques éléments de l'image à droite et à gauche de l'écran, et les contrastes laissent fortement à désirer. Il faut attendre dix bonnes minutes pour que le master trouve un équilibre correct mais le N&B demeure médiocre, parfois trop clair et certaines séquences apparaissent confuses. Certes la copie s'avère aléatoire puisque d'autres séquences sont nettement mieux conservées avec un grain atténué, des noirs plus concis, une diminution des dépôts résiduels, poussières et autres scratchs, et le piqué se ressaisit quelque peu. Néanmoins, des fourmillements subsistent tout du long et une révision des contrastes n'aurait franchement pas été de trop. La moyenne mais tout juste !
"Pas un mot, pas un colis, pas un mandat, rien ! C'est drôle quand vous êtes en forme ils sont toujours là. Ça s'appelle des amis et dès que le temps se couvre, ils disparaissent sous les portes et dans le trou des murs, fuyants, furtifs, des cafards, des cloportes !". Avec des dialogues de ce calibre on espérait une piste propre et sans accroc mais il faudra se contenter d'un mixage souvent sourd et couvert, quelques dialogues n'échappent pas non plus à une saturation, surtout au niveau des voix féminines plus grinçante. Le grand musicien de jazz américain Jimmy Smith signe la sublime composition du film qui se voit heureusement bien restituée et relativement harmonieuse. Hormis un petit ronronnement et quelques craquements, un souffle très appuyé demeure malheureusement omniprésent. Bizarrement, nous retrouvons un aspect "vieux film" qui n'est pour autant pas déplaisant.
Pierre Granier-Deferre et l’adaptation (11min38)
Denys Granier-Deferre, réalisateur et fils du metteur en scène de La Métamorphose des cloportes, La Veuve Couderc et La Horse, revient dans ce module sur la personnalité introvertie de son père mais surtout les rapports de ce dernier avec l’écriture et la littérature, en particulier son amour pour Georges Simenon qu’il adapta à quelques reprises au long de sa carrière (la série télévisée Maigret dans les années 80). Cette passion pour les livres et les mots remontent à l’enfance de Pierre Granier-Deferre, marquée par des problèmes de santé qui l’ont obligé à rester cloîtré seul chez lui où il fît d’ailleurs l’IDHEC par correspondance. Denys Granier-Deferre évoque l’amour de son père pour les personnages de milieu modeste, ainsi que son travail de metteur en scène proprement dit. Comme l’explique notre interlocuteur, la réalisation permettait à son père (qu’il appelle pudiquement Pierre) de se transposer, d’exister en filigrane tout en se mettant en retrait. Se dessine le portrait attachant d’un cinéaste dont le savoir-faire était destiné avant toute chose à se mettre au service d’une histoire tout en évitant tout effet gratuit.
Pierre Granier-Deferre sur le tournage du film Le Train avec Romy Schneider
Granier-Deferre contre Audiard (11min04)
Biographe de Michel Audiard, Philippe Durant rapporte dans ce segment de nombreuses anecdotes liées à l’écriture et la réalisation de La Métamorphose des cloportes. Il débute cette présentation par la rencontre entre Michel Audiard et Pierre Granier-Deferre en 1960 alors que ce dernier était l’assistant du réalisateur Denys de La Patellière sur le chef d’œuvre Un taxi pour Tobrouk dont Michel Audiard avait signé le scénario et les dialogues. Leur passion de la littérature, tous genres confondus, des grands classiques aux romans de gare les avait alors rapprochés. Michel Audiard, ne trouvant pas de réalisateur pour son adaptation du roman d’Alphonse Boudard La Métamorphose des cloportes, demande à Pierre Granier-Deferre de mettre en scène son histoire de truands ringards, le réalisateur acceptant plus par amitié que par attachement réel au projet qui n’emballe d’ailleurs guère les producteurs malgré la présence au générique de Lino Ventura. Philippe Durant fait ensuite la distinction entre l’univers de Michel Audiard (et du co-scénariste Albert Simonin) représenté durant la première partie du film (les répliques incisives caractéristiques de son auteur, le phrasé, le comportement des personnages), et celui de Pierre Granier-Deferre qui parvient à imprimer sa marque dans le deuxième acte marqué par des répliques plus modérées et des personnages plus ancrés dans un réalisme social. Notre interlocuteur clôt cet entretien en détaillant le procédé créatif de Michel Audiard qui écrivait alors les dialogues uniquement pour les acteurs concernés. Fréquentant les comédiens, le dialoguiste culte adaptait ses répliques mordantes selon le phrasé propre de chacun.
La Joyeuse équipe des cloportes (9min23)
Comme nous le signale un carton en ouverture, les images d’archives suivantes sont parfois altérées et présentent quelques défauts visuels et sonores sans pour autant perturber le visionnage. Ce document donne la parole au réalisateur, aux comédiens sur le plateau où la déconne et la bonne humeur règnent en maîtres. Maurice Biraud, Charles Aznavour, Irina Demick et même Lino Ventura se prêtent au jeu de l’interview où chacun chambre ses partenaires et le scénariste Michel Audiard.