Avatar
Le 23/12/2009 à 15:00Par Kevin Prin
On pourra toujours reprocher à Avatar d'être moins complexe qu'un Titanic dans son histoire, mais la comparaison n'a pas lieu d'être tant les projets n'ont finalement rien à voir. Ici James Cameron a crée un monde, un univers, comme on en avait jamais vu depuis Star Wars. Seul réel bémol : l'impression que le film pourrait être plus long. Les 2h41 passent comme une lettre à la poste et l'envie dès les cinq premières minutes du film de les revoir, confirment qu'on est là devant du très grand cinéma. Découvrez ci-dessous la critique du film AVATAR de James Cameron
CRITIQUE DU FILM AVATAR DE JAMES CAMERON
Cinq minutes. Au bout de cinq minutes du film pourtant quasiment uniquement composées de plans de la bande-annonce, on a déjà envie de les revoir. La raison d'un tel engouement provient notamment de l'univers crée ici, assemblé par James Cameron et pensé dans le moindre détail pour être « crédible » dans le sens le plus total du terme. Une bouffée d'air totalement dépaysante, où les images de synthèses ne sont pas juste là pour mettre en image ce qu'il était impossible de filmer mais pour donner vie à un environnement totalement imaginaire. Et il ne faudra même pas une heure pour se prendre à vouloir aller visiter cet endroit, à vouloir aller l'explorer. Ceux qui n'ont pas connu le choc que fut la sortie de Star Wars en 1977 peuvent maintenant imaginer son ampleur. En effet la recette initiale de James Cameron a finalement beaucoup de points communs avec celle de George Lucas : créer une dimension ouverte, réveillant nos instincts d'amateurs d'aventure, en partant de quelques points nous reliant à la réalité (ici quelques plans d'un voyage spatial, sublimement filmés de l'intérieur du vaisseau) pour mieux repousser ensuite les limites de notre imagination. La comparaison avec George Lucas s'arrête là.
Le premier trait de génie de James Cameron apparut avec Terminator, qui, en plus d'une histoire accrocheuse, de visions futuristes et cauchemardesques incroyables, innovait par son rythme, le récit étant raconté au cœur de l'action avec une maestria inédite. Un grand narrateur était né, possédant en lui la faculté de revenir à l'essence même de ce qu'est le cinéma : raconter des histoires. Si cette caractéristique n'a jamais quitté Cameron, elle est plus que jamais présente dans Avatar. En effet, la faculté qu'a le film à nous prendre dès les premiers instants et ne plus nous lâcher jusqu'à sa dernière minute n'aura que rarement connu son pareil, sa durée de 2h41 passant sans problème et la richesse de l'univers laissant le sentiment qu'on aurait aimé en voir encore plus.
Mais James Cameron ce n'est pas que ça. Le réalisateur possède en effet un sens visuel d'une richesse et d'une dynamique exemplaire. Chaque plan délivre son lot d'idées, son sens du cadrage parfait, comme si Cameron savait exactement non pas ce que nous voudrions voir mais ce que nous rêverions inconsciemment de voir. Que ce soit les plans dévoilant la planète Pandora, les plans larges révélant des horizons infinis, les plans serrés contenant chacun un détail les justifiant, ou dans sa dynamique, son sens du découpage, sa définition de ce que doit être une scène d'action, Avatar est un véritable festival visuel dans la droite lignée d'un cinéma classique à son apogée. Il suffit de prendre pour exemple les combats aériens ou encore l'utilisation des mechas (leur maniement est un véritable fantasme de gosses) pour réaliser à quel point James Cameron règne en maître incontesté de la scène d'action.
En tant que film de science-fiction, Avatar s'inscrit comme une référence implacable en la matière. Le cahier des charges de base de la SF est très simple : utiliser un univers imaginaire, futuriste, pour déployer une argumentation sur notre présent. Sur ce point, le parti pris du film est radical, clair, profond et compréhensible de tous, engagé jusqu'à l'os sans pour autant sombrer dans l'analogie facile et le martelage moralisateur énervant. Bien au contraire, toute l'efficacité de Cameron se retrouve dans le discours écologique définitif qu'il tient et dans la solidité de la finesse dont il fait preuve, sans jamais commettre le moindre écart superflu. Un engagement quasi-politique passant par une spécialité de Cameron : les visions graphiques proches du cauchemar, empruntant à des éléments contemporains, l'un d'entre eux étant bien sûr l'invasion militaire et la destruction qui s'en suit. Une intelligence de construction de discours et de construction d'images allant jusqu'à ne pas fermer ce film à la simple horde de fans de SF, aux « mecs » dans ce que cela peut signifier de plus péjoratif, ou même aux adultes. On se gaussait devant la bande-annonce réservée aux chaînes TV américaines pour enfants, on ne peut que ravaler notre mauvaise langue : Avatar s'adresse à tous et constitue un spectacle fascinant pour les plus jeunes, qui y verront sans aucun doute une sorte de film ultime à voir et revoir en boucle. La richesse graphique, l'émotion qui se dégage, l'affrontement du bien et du mal, la violence brillamment dosée (et toujours justifiée).
A cela, il faut rajouter la performance exemplaire des acteurs, de Stephen Lang en méchant très « Michael Biehnien » (Abyss), à Sigourney Weaver, qu'il fait si plaisir de revoir en si bonne forme, en passant par Michelle Rodriguez (qui n'aura jamais été aussi belle, soit dit en passant), en passant par ceux qui n'apparaissent que sous des traits virtuels (ce bon vieux Wes Studi, reconnaissable immédiatement !) jusqu'à l'acteur principal, Sam Worthington, d'une justesse parfaite. A cela il faut aussi rajouter la musique de James Horner, dont les mélodies simples sont d'une beauté envoûtante (on est loin de Titanic), la richesse visuelle, etc. Et la technologie.
On aura souvent annoncé Avatar comme une révolution technologique, notamment en ce qui concerne sa 3D relief. Effectivement, Avatar est le film l'utilisant le mieux à ce jour, celle-ci transcendant énormément de plans qu'on n'aurait pas imaginé voir autrement (dans la première minute du film, le plan où les voyageurs sortent de leur capsules de sommeil nous hantera encore longtemps, ce plan spatial étant sans doute l'un des plus beaux depuis 2001 de Kubrick). Mais ce sont surtout les images de synthèses que l'on retiendra, celles-ci franchissant un cap révolutionnaire dans l'histoire du cinéma, puisque chaque personnage possède des expressions faciales jamais vues sur une reconstitution virtuelle. Ils ont une âme, permettant d'oublier en un fragment de seconde qu'il ne s'agit pas d'êtres réels et de se concentrer sur l'histoire. Une caractéristique valable sur chaque élément du film, des insectes aux animaux, en passant par toute la faune et la flore du film.
Des qualités, des qualités, des qualités.... Et les défauts ? On pourrait reprocher à Avatar de ne pas tenir la comparaison en terme de complexité scénaristique avec Titanic, on pourrait lui reprocher aussi de ne pas atteindre le niveau d'immersion d'un Abyss, mais en fait qu'importe : il s'agit de projets qui n'ayant rien à voir avec cette aventure SF, les intentions n'étant pas du tout les mêmes et Cameron relevant absolument tous les défis qu'il s'est lancé ici.
En résumé : Avatar est un fantasme de cinéma, de science-fiction, de film d'action, de film d'aventure, de personnages et d'idéologie. Un film immense dont l'incroyable révolution technologique n'est que la cerise sur le gâteau. C'est juste du grand cinéma.
Date de première publication de la critique : 11/12/2009, 0h01