Joshua
Le 18/03/2008 à 11:07Par Arnaud Mangin
Il y a donc des films, comme ça, qui suscitent d'énormes craintes parce qu'ils n'ont pas le moindre intérêt sur le papier, que devant eux se traînent quelques navets à l'univers pas si éloigné et parce que certains noms semblent inappropriés... Et puis, il y a des surprises. Tant mieux, Joshua n'est pas l'énième resucée de La Malédiction que l'on pouvait redouter. Mais tant pis, sur ses deux heures moins le quart, ce sympathique thriller traîne derrière lui quelques scènes au ventre mou l'empêchant de nous captiver sur toute sa longueur. Peut être un peu trop de blabla pour extrapoler autant de chichi dont on aurait pu effectivement se passer. Certaines mises en images simplistes posant l'essentiel de l'atmosphère sans trop avoir besoin d'en rajouter. Chose d'autant plus dommageable que le film se risque au bis repetita avec son histoire de mioche psychopathe menant la vie dure à ses parents jusqu'à la complète tragédie, tout en conservant une part d'originalité. Et finalement, ça reste suffisamment malin dans sa narration pour éviter les gros pièges hollywoodiens lui tendant leurs bras musclés.
C'est donc l'histoire d'une famille BCBG qui s'efforce d'être suffisamment prout-prout pour faire briller avec fierté le regard des beaux parents respectifs lorsque ces derniers squattent perpétuellement le cocon niché au sommet d'un building à Manhattan. Lorsqu'il sort des mondanités hebdomadaires, monsieur préfère être relax et s'éclater autant que possible au bureau avec les collègues ou à la maison avec le gosse et le chien, tandis que madame accepte mal son statut de mère au foyer au moment où elle vient justement de mettre au monde une petite dernière. Un bébé qui pleure en plus, tu parles d'une plaie ! Seul Joshua se cherche, finalement, entre des cours de piano auxquels il excelle sans toutefois y trouver du plaisir, et les castagnes à l'écoles de catéchisme qu'effectuent les adultes pour savoir où le placer. Pas vraiment l'égocentrisme qu'il attend. Joshua ne veut que de l'amour, de l'attention, et c'est malheureusement sa petite sœur qui bénéficie de tous ces privilèges alors qu'elle n'a jamais fait le moindre effort... De quoi écrouler son monde, mais aussi celui des autres. Et quand c'est justement celui des autres qui s'effondre, on se demande si l'étrange bambin n'est juste que l'heureux bénéficiaire des accidents qui ponctuent le quotidien, ou s'il en est aussi l'instigateur...
L'intérêt ici n'est même pas de dresser le portrait du Mal au visage d'ange - chose dont on se foutrait totalement aujourd'hui - mais plutôt de dévoiler méchamment l'échec d'un cocon familial. L'arrivée d'un bébé, ça fait mal. Et pas qu'au frère aîné qui y voit ici le grain de sable empêchant son petit confort de tourner en rond : religion, état de santé, relations de belles-familles, activités studieuses et professionnelles se retrouvent remises en cause. Un contournement des clichés d'un autre âge faisant flirter Joshua entre thriller et drame contemporain, mais qui justifie ici mille fois la présence de l'excellent Sam Rockwell. Si pendant 10 minutes on se demande ce que peu bien faire l'acteur fou dans une pareille entreprise, la dégénérescence progressive de l'intrigue (baignant dans un type d'humour global au degré imperceptible) trouve effectivement sa meilleure carte avec le comédien. Un film étrangement drôle, parfois inquiétant, mais dont la morale est loin d'être bête...