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La Route

Le 03/11/2009 à 08:39
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Notre avis
8 10

Dans un monde post-apocalyptique plongé dans la barbarie, deux êtres refusent de renier la civilisation, de laisser mourir la flamme qu'ils portent en eux, de s'éloigner de la route. Si Viggo Mortensen et Kodi Smit-McPhee donnent vie aux personnages du roman de Cormack McCarthy avec une rare intensité, John Hillcoat se révèle plus que jamais inspiré par son sujet et signe avec La Route une film visionnaire questionnant la foi en l'avenir et en l'être humain. Une œuvre puissante.

Découvrez ci-dessous la critique de La Route


Critique du film La Route de John Hillcoat

Porter à l'écran un roman tel que La Route de Cormack McCarthy relève du véritable défi narratif et formel. Reposant sur une écriture très dépouillée requérant une extrême concentration de la part du lecteur (quasi absence de ponctuation, rareté des dialogues mêlés au récit), La Route n'apporte que très peu de précisions sur les personnages (leurs noms ne seront jamais connus), pas plus qu'il ne se perd en explications historiques sur l'état dévasté dans lequel se trouve la Terre. La planète est simplement détruite, sans vie, plongée dans la grisaille d'un nuage de cendres et de poussières. Tout comme il entretient le flou sur le passé des deux principaux protagonistes, un père et son enfant, Cormac McCarthy leur alloue un objectif des plus incertains : atteindre le sud. Mais pour aller où ? Nul ne le sait. Ce parti pris de dénuement, le cinéaste John Hillcoat (The Proposition) le respecte scrupuleusement et parvient à restituer cette impression que le temps est suspendu, que le passé et l'avenir n'existent plus, traduisant ainsi avec force et réalisme l'obsession permanente du père (Viggo Mortensen) et de l'enfant (Kodi Smit-McPhee), à savoir la survie dans ce qu'elle a de plus fondamentale, de plus primale.

 

 

Critique du film Critique du film La Route de John Hillcoat de John Hillcoat

 

 

Adaptation d'une grande fidélité à l'œuvre d'origine, La Route - le film - en reprend point par point les péripéties, de la découverte du garde-manger des cannibales à l'épisode tragique du voleur, dressant un tableau chaotique du futur tandis que les flash-back offrent une vision parcellaire du monde avant et pendant la catastrophe centrée sur la démission de la mère (Charlize Theron). John Hillcoat ne s'est pas intéressé au roman de Cormack McCarthy par hasard : déjà dans ses précédents métrages, à commencer par son superbe western australien The Proposition, le cinéaste questionnait la notion de moralité en situation extrême, une thématique exacerbée dans le contexte post-apocalyptique de La Route. Dans un monde plongé dans l'anarchie et la barbarie, deux êtres refusent de renier la civilisation, de laisser mourir la flamme qu'ils portent en eux, de s'éloigner de la voie qu'ils ont décidé de suivre. Quant à savoir lequel des deux protagonistes permet à l'autre de trouver la force de suivre la route, la réponse n'est peut-être pas celle que l'on croit. Sans jamais s'alourdir de considérations bondieusardes, La Route offre un questionnement émouvant de la foi, en un dieu éventuel bien entendu mais aussi (et surtout) en l'être humain, l'espoir se trouvant personnifié par le petit, le seul à avoir gardé la capacité à tendre la main vers son prochain. A ce titre, à travers la quête constante de nourriture des personnages, La Route prend aussi une dimension sociale évidente en posant une question toute simple : et si nous devenions tous des sans-abri ?

 

 

Critique du film Critique du film La Route de John Hillcoat de John Hillcoat

 

 

Pour incarner les deux êtres errants qui occupent le devant de la scène, il fallait des comédiens capables de porter le film sur leurs épaules, l'action n'étant finalement pas primordiale - même si la violence est au rendez-vous, sèche et réaliste - dans un récit avant tout centré sur l'histoire d'amour entre le père et son fils. L'enfant est incarné par le très doué Kodi Smit-McPhee, dont le regard angélique n'a pas fini de nous hanter et qui donne magnifiquement la réplique à Viggo Mortensen, acteur physique très habité, d'une justesse absolue jusque dans le moindre de ses gestes, de ses regards. Outre la matière et l'émotion du livre, La Route réussit le tour de force d'en restituer l'univers visuel, vision expressionniste du désespoir et du sentiment d'abandon qui gangrènent les êtres humains. Cette esthétique de la désolation décrite de manière clinique par Cormack McCarthy est sublimée dans le film par un travail méticuleux sur les décors et une photographie presque monochrome. Un soin visuel soutenu par un travail sonore d'une incroyable efficacité - rarement le silence aura été aussi angoissant. Fidèle collaborateur de John Hillcoat, Nick Cave compose une bande originale ambiante, puissante, même si certains passages ne sont pas exempts de quelques recours à des facilités pour appuyer inutilement l'émotion.

Plus que jamais inspiré par son sujet, John Hillcoat confirme non seulement le talent qu'on lui connaissait déjà mais révèle avec La Route des qualités de cinéaste visionnaire.

 

Critique du film Critique du film La Route de John Hillcoat de John Hillcoat








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