Gerardmer : Jour 1
Le 25/01/2008 à 11:20Par Kevin Prin
Après une première soirée consacrée surtout à la cérémonie d'ouverture et les projections de Cloverfield et Stuck (le nouveau Stuart Gordon dont nous reparlerons plus tard), place à la première véritable journée où cinq films, dont quatre en compétition, se sont succédés. Nous avons démarré la journée à 11h00 avec ce qui s'annonce comme l'un des plus mauvais film de la sélection, Epitaph, premier film coréen. Un bien joli calvaire qu'Arnaud Mangin vous détaille dans sa chronique ci-dessous. Nous avons ensuite rejoint à midi un buffet dans les hauteurs de Gerardmer, où tous les invités côtoyaient les membres du jury avec leur assiette à la main pour se servir leur repas. Il fallait voir Takashi Shimizu hésiter entre salade et pommes de terre, Kristina Loken manger son pain en discutant avant le repas, Stuart Gordon savourer son coca light à côté de Jess Franco, ou Kevin Prin conseiller une tarte à la pomme à Neil Marshall autour de la table des desserts. Une ambiance complètement surréaliste : vous vous imaginez à la cantine à côté d'un réalisateur ?
La suite des projections nous a amené à voir trois films : Teeth, où une fille ultra catholique tue avec son vagin qui a des dents (!!), Le Roi de la montagne, survival espagnol fort sympathique, et Frontière(s) que vous pouvez déjà retrouver dans les salles, mais pour lequel nous avons eu droit à la visite de l'équipe (Xavier Gens et 4-5 acteurs). La projection de ce dernier fût d'ailleurs un pur moment anthologique dans la journée, puisque la salle entière était prises de fous rires sur toute la longueur de ce film considéré par Kevin Prin et Arnaud Mangin comme un nanar rare.
EPITAPH
Sortie : indéterminée
Rien de tel que l'immanquable film chiant propre à chaque festival annuel pour démarrer la matinée ! Nous, on aurait bien aimé un programme punchy du genre Cloverfield 2 pour nous sortir de notre torpeur mais on s'est purement et simplement farci le truc qui a carrément assommé toute l'assemblée... Un film avec des femmes qui crient en gémissant parce - long métrage fantastique coréen oblige - elles croisent un fantôme tout sale lorsqu'elles ne contemplent pas des escargots collés un peu partout. C'est donc ça Epitath - enfin du moins ce qu'on en a pigé puisque ici tout le monde s'est donné un malin plaisir à brouiller les cartes jusqu'au flou le plus total : l'histoire d'une morgue en 1942 où se retrouvent ceux qui se sont aimé jadis malgré quelques relents de pulsions meurtrières. N'en demandez pas plus puisque entre les bonnes femmes qui n'ont pas d'ombre, qui se révèlent en fait être un autre, que l'autre en question est lui-même le reflet d'une troisième personnalité (lourd hein ?) et qu'un serial killer en profite pour dépouiller les héros de guerre locaux, on en perd notre latin. Reconnaître la poésie de la chose, ses belles images et un certain soin plastique ne nous empêche pas de réclamer un peu de vie et d'intérêt à cet univers foutraque. Epitaph ne possède ni l'un, ni l'autre...
Sortie : 7 Mai 2008
Tout démarre par un flashback : la petite Drew, 4 ans, est dans sa piscine avec son demi-frère (aucun lien de sang) et joue à touche pipi avec lui. Malheureusement, au moment de la toucher, il pousse un cri et ressort son doigt ensanglanté, mordu et légèrement arraché. Quelque chose de dentu vit dans le vagin de Drew...
Malgré le pitch complètement délirant de Teeth, une majeure partie du film fonctionne sur un ton de gravité, voire de drame. Un décalage s'installe dès cette étrange première scène (le regard de la petite fille de 4 ans est marquant), et se confirme dès le générique, sorte d'electroplankton (le jeu DS) où des lymphocytes observés au microscope se font bouffer par des virus jusqu'à ce que le dernier survivant décide de se rebiffer. L'histoire passe ensuite à l'adolescence de Drew, où la jeune fille défend devant des hordes d'ados les valeurs morales de l'abstinence et de la pureté. Sauf que le démon va bien évidemment la tenter et que ses dents vont arracher du pénis !
Utilisant des valeurs morales qui pourront paraître totalement rétrogrades et désuètes pour nous, mais totalement crédibles outre-atlantique, Teeth se révèole au contraire de ses apparences comme une oeuvre absolument transgressive, bataillant derrière une métaphore bien originale pour la découverte du sexe à l'âge adolescent. Le message simpliste que pourrait être "Le sexe c'est super !" trouve là une illustration vraiment intelligente, sous des aspects de film d'horreur au comique de situation vraiment réussi.
Alors oui, Teeth souffre de quelques longueurs et surtout d'une réalisation terriblement plate. Mais l'univers crée autour du personnage de Drew, incarné par l'excellente Jess Weixler (la révélation du film), mérite amplement le détour. A découvrir !
LE ROI DE LA MONTAGNE
Sortie : 4 Juin 2008
Voilà un film qui ne paye pas de mine, pas plus qu'il ne semble révolutionner quoique ce soit. Pourtant, Le Roi de la montagne peut encore figurer parmi les outsiders, ne serait-ce que par son retour affiché au cinéma de genre conceptuel de base. Alors que l'on riait grassement comme des bossus devant la comédie française Frontière(s) - véritable caricature de film d'horreur - deux heures plus tard, le petit film de Gonzalo Lopez-Gallego sort le cinéma espagnol des sentiers battus et se frotte au survival pur. On ne se fie donc pas à son titre un peu austère, faisant penser à un biopic d'artisan tchétchène, pour comprendre qu'il s'agit d'une histoire assumant ses inspirations du côté de Délivrance. Le pitch en tout cas est archi simple : Après s'être fait volé son portefeuille par une jeune fille sur une aire d'autoroute, Quim se lance à la poursuite de cette dernière avant de finir perdu dans une région montagneuse et boisée. A peine cherchera-t-il son chemin qu'un chasseur invisible armé d'un fusil à lunette le prend pour cible. Dans sa fuite il tombera miraculeusement sur sa voleuse, elle-même aussi dans la ligne de mire de l'indécelable tireur. La survie, c'est la fuite donc pour ces deux personnages obligés de courir à travers bois pour éviter de se faire atteindre. Malgré sa grande modestie, le film démontre en tout cas que le cinéma européen peut encore de frotter à des intrigues typiquement américaines et livrer quelques thrillers intéressants à budget réduit. Imparfait dans son résultat, le film brille en tout cas dans ses intentions. Surtout dans ses nombreux effets de surprise...
FRONTIERE(S)
Déjà dans les salles
Il serait à la base vraiment inutile de revenir sur ce film qui a déjà été chroniqué dans nos colonnes et qui est déjà sorti dans les salles. Sauf que si Pierre Delorme l'a défendu dans sa critique, nous-même (Kevin Prin & Arnaud Mangin) l'avons trouvé nanardesque au possible. Esthétiquement soigné mais quand même laid (les nuits vertes, les brouillards dans les intérieurs, bof), cadré et monté efficacement, le problème vient surtout du côté des acteurs. Xavier Gens ne semble absolument pas à l'aise pour diriger ses comédiens puisque chacun d'entre eux part dans une interprétation cabotinesque ultime. Pour comprendre, il suffit d'entendre les dialogues débités n'importe comment, d'autant que ces derniers se révèlent particulièrement accablants. Samuel Le Bihan nous livre ici l'une de ses pires performances, Estelle Lefebure est hilarante, et le pompon est remporté par le grand méchant, un vieux nazi répétant toutes ses phrases en allemand et en français avec une diction impayable digne de Papa Schultz ! Et le pire c'est que ça marche ! Frontière(s) s'impose indéniablement comme le fou-rire ultime du moment, comme le spectacle à regarder absolument entre potes au même titre que l'était Les Rivières Pourpres 2 à son époque ! Le grotesque est tellement peu assumé que le potentiel de rires envahissant toute une salle pendant des demi heures entières, est propice à créer une ambiance comme on en voit rarement au cinéma. A ne pas rater donc, pour peu qu'on accepte de rire d'un gros nanar ! D'autant plus que le film se veut ultra trash et gore... mais que chaque effet est totalement risible !
Textes rédigés par Kevin Prin et Arnaud Mangin