Le Monde fantastique d'Oz : la critique du film

Après quatre ans d'absence, l'attente suscitée par la dernière réalisation de Sam Raimi était à son paroxysme. Le réalisateur de la trilogie Spider-Man a fait le choix de s'attaquer à l'un des monuments de la littérature de jeunesse américaine : Le Magicien d'Oz de L. Frank Baum. De fait, il se frotte également à un classique du septième art, le film réalisé en 1929 par Victor Flemming. L'enjeu était donc de taille et la pression à son comble. Parviendrait-il à éviter les écueils de cet exercice en signant une préquelle au roman et au film ? Les événements du film n'appartiennent ni au roman, ni à la comédie musicale. Raimi s'est concentré sur le personnage du magicien, sur ses origines et sur son histoire. Il jouit ainsi d'une liberté de ton qui lui permet de plonger le spectateur dans un univers qui lui est propre. Porté par un casting édifiant (James Franco, Rachel Weisz, Mila Kunis et Michelle Williams), Le monde fantastique d'Oz est (presque) à la hauteur de l'attente suscitée...

La première grande innovation de ce long-métrage est la nouveauté apportée par le scénario. En cherchant à démystifier le personnage du magicien, on suit les pérégrinations d'Oscar Diggs, histrion aux mœurs douteuses, un peu pédant, pourtant très attachant, qui s'ennuie ferme et qui semble ne respecter personne (si ce n'est lui-même) dans le Kansas du début du XX ème siècle. Soudain, sa montgolfière est emportée par une tornade et l'emporte dans une contrée lointaine, le Pays d'Oz, où les plaines sont luxuriantes et les possibilités nombreuses. Comble de l'histoire, il y est attendu comme le messie. Il est alors bien décidé à saisir ce qui semble être la chance de sa vie. Seul impératif pour accéder à la richesse escomptée : chasser la terrible et méchante sorcière qui plonge le pays dans l'effroi. Il est évident qu'il n'est pas le magicien qu'il prétend être. Et dans ce jeu des apparences, il va également de soi que les méchantes ne sont pas celles que l'on désigne et que les gentilles ne sont pas celles qui le revendiquent. Ce suspens très manichéen s'étiole vite. Qu'importe, l'histoire n'en est pas gâchée. Porté par le charme de James Franco, ce conte familial tient la route.

La seconde (et belle) surprise tient au respect des œuvres précédentes. Sam Raimi est parvenu à ce difficile alliage : celui de ne pas trahir ou dénaturer l'univers crée par l'auteur américain, tout en prenant quelques libertés et en y ajoutant sa patte. Cette préquelle en live-action 3D ne se contente pas de respecter les œuvres de ses prédécesseurs, il la prolonge. Visuellement, le film est une réussite. L'univers crée est enchanteur. Le Monde d'Oz regorge de créatures singulières et charismatiques, à l'image du singe Finley ou de cette attachante poupée de porcelaine. Une réelle interaction s'opère à l'écran entre les différents protagonistes. Et ce malgré la difficulté initiale, ils sont crées en images de synthèses.

Surtout, le réalisateur fait étale d'une parfaite technique et a su la rendre intelligente. Les vingt premières minutes nous plongent dans le terne État du Kansas. Ces scènes sont en noir et blanc, la 3D est utilisée au minimum. C'est une fois dans le monde d'Oz que l'image passe au format large et que la 3D apparaît progressivement. Une très bonne idée qui mérite d'être saluée.

En revanche, le film pêche par sa simplicité dramatique. L'histoire est certes jolie, mais sans grandes surprises. Les péripéties se succèdent, sans étonner et sans nous inquiéter. On devine aisément que les méchantes seront envoyées au tapis pour laisser place aux preux, ceux qui possèdent un cœur. Les réfractaires aux dialogues mille fois entendus (« vous pouvez tuer un homme, mais pas son idée ») risquent de lever plusieurs fois les yeux au ciel... On aurait donc apprécié un brin d'imagination accompagné d'un zeste de surprise. Le tout est très convenu – trop peut-être. Il est toutefois difficile de ne pas être emporté dans le même tourbillon que le protagoniste, de ne pas s'émerveiller devant la cité d'Emeraude et de ne pas trouver le voyage agréable. On l'aurait toutefois aimé plus palpitant.