Deadgirl
Le 05/02/2009 à 19:42Par Yann Rutledge
Notre avis
Un groupe de jeunes boutonneux solitaires découvre dans les sous-sols d'un hôpital psychiatrique désaffecté un jeune fille nue à moitié attachée à une table. Lorsqu'ils découvrent que celle-ci ne peut mourir, pour une raison mystérieuse, elle devient ni une ni deux l'exutoire parfait à toutes leurs frustrations sexuelles et pulsions violentes. Tel est le pitch de ce Deadgirl qui poursuit sa carrière de festival en festival, depuis Toronto en Septembre 2008 jusqu'à Gérardmer en Janvier 2009. Précédé d'une sulfureuse réputation, le film du tandem Marcel Sarmiento et Gadi Harel n'était pas moins, pour le spectateur déviant adepte de sensations fortes, que LE film à ne surtout pas louper. Ca tombe bien, nous faisons précisément partis de cette honteuse catégorie de cinéphages déviants.
Avec un pitch annonçant un truc malsain pire que Martyrs, c'était assurément l'envoi illico presto de la brigade de bonnes mœurs à la sortie de la salle. Oui mais voilà, les deux petits malins derrières la caméra ne semblent au bout du compte pas vraiment savoir sur quel pied danser. Est-ce le film ouvertement malsain auscultant l'emprise masculine sur une innocente femme, la chronique gusvansantienne sondant le spleen adolescent ou est-ce le film à l'humour graveleux et poussif qu'ils recherchent ? Deadgirl, c'est trois films en un, trois approches incompatibles sur le papier et qui à l'écran (surprise !) ne fonctionnent pas mieux.
Au bout d'une demi-heure, les deux compères donnent l'impression de ne plus croire en leur pitch, comme si considérant subitement leur postulat de départ grotesque ils décidaient, par peur du ridicule, d'y ajouter une pincée de second degré ponctuellement sur certains dialogues et parfois par l'apport d'entières séquences que le traumaesque Lloyd Kaufman n'aurait pas renié. Tel le "elle ne va pas te mordre" d'un des gars en collant son sexe sur la bouche de la jeune fille dans l'espoir d'une fellation, ou même la tentative d'enlèvement foirée par deux incapables pieds-nickelés (dont l'un, Wheeler, est juste à claquer tant il est insupportable) pendant laquelle l'agressée se retourne violemment contre les agresseurs. Et on ne parle même pas du dénouement ridicule (on n'en dira pas plus au risque d'un gros spoiler). On ne doute pas que ces éléments comiques furent présents dès la première monture du scénario de Trent Haaga - dont le seul fait de gloire au milieu de direct-to-video peu recommandables (Hell Asylum, Feeding the Masses... hum hum) est d'avoir été co-scénariste sur le cultissime Citizen Toxie - on ne comprend par contre pas comment ni pourquoi ceux-ci ont été conservés au final.
Ce serait donc un euphémisme que de dire qu'on sort véritablement frustré de Deadgirl. On se prend à imaginer le choc du film si Sarmiento et Harel avaient tout du long vraiment eu confiance en la noirceur abyssale et déviante de leur projet. Parce qu'il garde le cul entre deux chaises, le résultat tel qu'on le connaît ne satisfera ni les masochistes à la recherche d'expériences radicales, ni les aficionados de films trash et fun.
Mise à jour du 18 janvier 2012 : Si une suite à Deadgirl à rapidement été évoquée, trois ans plus tard celle-ci n'a toujours pas montré le bout de son nez. Trent Haaga le scénariste de Deadgirl premier du nom a pourtant écrit le script de ce qui devait être la suite. Cette fois-ci c'était une bande d'adolescentes qui découvrait la "fille morte" en titre. Plutôt que d'en faire un exutoir à fantasmes sexuels, elles l'utilisaient pour se venger des hommes... Plutôt que de ranger le script de Deadgirl 2 sur une étagère pour que personne ne puisse lire, Trent Haaga a décidé de le proposer en téléchargement sur son blog.