Inspiré d'une histoire vraie, celle d'un jeune journaliste anglais ayant sauvé la vie d'une soixantaine d'orphelins chinois dans la Chine des années 30, Les Orphelins de Huang Shi possède toutes les apparences d'une grosse production conventionnelle s'achevant inévitablement par une bonne leçon de morale consensuelle. A l'arrivée, il s'avère que cet a priori n'est pas totalement infondé, mais le film n'en possède pas moins quelques qualités. N'allons cependant pas crier au chef d'œuvre. Malgré les intentions louables et l'humanisme qui guident indéniablement l'entreprise, celle-ci laisse vite apparaître quelques faiblesses handicapantes, à commencer par une mise en scène impersonnelle et un casting inégal.

 

Avouons-le, Roger Spottiswoode ne nous avait jusqu'ici pas franchement convaincus, le bonhomme ayant commis quelques nanars notables, dont l'un nous est particulièrement resté en travers - nous pensons bien sûr à Demain ne meurt jamais, peut-être le pire opus de la saga James Bond jamais réalisé. Sans surprise, ce n'est pas encore avec Les Orphelins de Huang Shi que Spottiswoode risque de se hisser au rang des grands cinéastes de ce monde. Les choses ne s'annoncent d'ailleurs pas folichonnes dans les premières minutes de bobine puisque le film échoue à installer son contexte historique. En dépit d'une volonté justifiée de montrer les horreurs perpétrées par les soldats japonais, les séquences se rapportant à la guerre manquant réellement d'authenticité et d'ampleur. La faute à un décor carton pâte et à des personnages secondaires peu crédibles - le rebelle incarné par Chow Yun-Fat en tête. Mais dès lors que Hogg (Jonathan Rhys-Meyers) se rend à l'orphelinat et fait la connaissance des enfants, le film décolle enfin en s'intéressant à l'expérience personnelle de son héros. Les Orphelins de Huang Shi relate la rencontre entre deux univers que tout oppose mais aussi une aventure humaine qui ne laissera pas insensible, de par l'idéalisme qui en ressort. L'alchimie entre Jonathan Rhys-Meyers (Match Point) et chacun des jeunes comédiens qui l'entoure fonctionne à merveille, dans le conflit comme dans la complicité, et les personnages des enfants bénéficient d'un traitement évitant bien souvent les pièges du simplisme. Celui du jeune Shi Kai (Guang Li) s'avère à ce titre sans concession, chose impensable dans une production hollywoodienne.

 

Là où le bât blesse, c'est dès lors que l'on sort du strict cadre de la relation entre Hogg et les orphelins. En effet, la réalisation se révèle le plus souvent bien trop dénuée d'âme pour faire oublier la présence d'ellipses maladroites et de faiblesses scénaristiques, notamment une écriture bâclée des personnages secondaires, parmi lesquels les protagonistes féminins font figure de mauvais de la classe. Il faut dire que le casting contribue à provoquer l'ennui, entre une Radha Mitchell (Silent Hill) peu convaincante en aventurière, et une Michelle Yeoh trop austère pour son personnage de commerçante jouant de ses charmes. La sous-exploitation des sublimes décors naturels qui entourent les lieux de l'action contribue par ailleurs à expliquer l'absence d'atmosphère du film - on est loin des paysages saisissants du Voile des Illusions de John Curran -, y compris lorsque survient la traversée supposée conclure de manière grandiose l'aventure, un voyage qui passe malheureusement bien trop vite. Les Orphelins de Huang Shi laisse donc un arrière goût mitigé, brillant par quelques moments d'intensité et de fraîcheur, mais décevant par sa narration bancale et ses nombreuses maladresses.