Critique : Magnum l'intégrale (Saisons 1 à 8)

C'était avec un plaisir non dissimulé que je découvrai ce que le petit Papa Noël m'avait apporté sous le sapin, l'intégrale de Magnum, soit huit saisons, soit 161 épisodes de 50 minutes produits entre 1980 et 1988. Néanmoins, tout de suite après l'excitation d'avoir enfin l'objet tant convoité devant moi, une question me taraudait : la série aurait-elle su traverser le temps et le résultat final ne serait-il pas décevant ? En effet, de nombreuses séries cultes des années 80, comme l'Agence tous risques, MacGyver, sans parler des comédies style Arnold et Willy, sont à la limite du regardable tant le poids des années plombe le plaisir de les revoir.

Après un mois intensif de visionnage, je peux vous affirmer que le plaisir est toujours intact, du moins pour les Magnumaniacs.

Synopsis.

De retour du Vietnam, Thomas Magnum s'engage dans une carrière de détective privé. Suite à un pari avec le célèbre écrivain Robin Masters (Pilote Pas de Neige sur Hawaï), Magnum gagne le droit d'occuper la dépendance de la superbe propriété de l'écrivain sur l'archipel d'Oahu et s'octroie par la même occasion l'usufruit d'une superbe Ferrari. Petit problème, le détective devra partager les lieux avec Higgins, un britannique à cheval sur les principes et éternellement accompagné de ses deux terreurs, Zeus et Apollon. Aidé par ses deux amis Terry et Rick (Orville de son vrai prénom !), Magnum multiplie les enquêtes souvent dangereuses.

Si il est impossible de détailler plus de 160 épisodes dans cette critique, on peut néanmoins en tirer quelques généralités. Contrairement à de nombreuses séries policières, l'humour est quasi omniprésent à chaque épisode, que ce soit à travers la relation conflictuelle entre Higgins et Magnum ou à travers la voix off qui offre toujours un point de vue amusé sur la situation et qui s'adresse directement au spectateur - « Oh, mais je sais ce que vous allez dire ! ». A noter que les Français furent particulièrement gâtés pour cette voix off puisque le travail de doublage de Francis Lax fut absolument formidable, apportant une touche d'autodérision séduisante.

Le gros point fort de la série au cours des huit saisons est de varier les scénarios en alternant les épisodes sérieux, avec des enquêtes parfois très originales, et d'autres plus décontractés. Ainsi l'enquête n'est parfois qu'un prétexte, par exemple au cours de l'épisode 7 de la saison 7, Ascenceur pour nulle part, où Magnum échafaude pour la première fois la théorie qu'Higgins serait en réalité Robin Masters en personne. Dans le cas où l'enquête est accessoire, sa résolution se voit d'ailleurs expédiée en toute fin d'épisode (Le méchant était machin, il vient d'avouer...merci et au revoir). Si les scènes d'action (bagarres, courses-poursuites, cascades...) ont vieilli comme des scènes d'action des années 80, c'est-à-dire mal, elles ne forment en réalité que la portion congrue de chaque épisode de Magnum.

Autre point fort de la série, le casting. A la fois charismatique, punchy, rempli d'autodérision et dramatique quand il le faut, Tom Selleck apportait tout ce qu'il fallait à son personnage pour en faire un héros à la personnalité unique. Une sorte de grand enfant espiègle et amusé mais qui peut devenir très sérieux selon les situations. L'acteur a même réussi l'exploit de faire croire à des millions de personnes que porter la moustache était branché... On ne peut donc que regretter qu'il n'ait pas eu la carrière cinématographique qu'il méritait amplement tant il parvient à entraîner les spectateurs dans ses émotions avec un talent rare. A ses côtés, John Hillerman est également irréprochable dans le rôle d'Higgins mais aussi de tous ses demi-frères, alors que Larry Manetti (Rick) et Roger E. Mosley (Terry) sont plus classiques mais prennent de la consistance au cours des saisons grâce aux épisodes qui leur sont consacrés.

En outre, les scénaristes incluent régulièrement au cours des enquêtes des personnages (clients ou amis) hauts en couleurs comme Luther Gillis (Eugène Roche), Agatha Chumley (Gillian Dobb) ou Mac Reynolds (Jeff MacKay). De nombreuses guests stars font également des apparitions dont Shannen Doherty (qui est cependant encore inconnue à l'époque), Frank Sinatra ou encore Sharon Stone au cours d'un superbe double épisode de la saison 5 (Prémonitions, Saison 5 épisodes 1 et 2).  A noter que la voix entendue au téléphone lors des premières saisons comme étant celle de Robin Masters est en réalité celle de Orson Welles qui devait interpréter l'écrivain lors d'un épisode surprise. Suite au décès de Welles en 1985, les scénaristes ont eu l'idée de jeter le trouble dans l'esprit des spectateurs en laissant Magnum supposer que Robin Masters serait en réalité Higgins.

Puisque l'humour, la légèreté et les chemises à fleurs sont présents à chaque épisode, serait-ce à dire qu'il n'y a aucun élément dramatique ? Loin de là puisque le passé de Magnum, de Rick et de Terry en tant que vétérans du Vietnam est l'un des fils conducteurs de la série. Lorsque Magnum débute en 1980, le sujet de la guerre du Vietnam est encore tabou et les vétérans ont une image de bouchers qui devraient avoir honte. Sans jamais se positionner sur le bien-fondé ou non de cette guerre, la série aborde le sujet à travers l'historique de ses héros, ce qui mène parfois à des scènes très dures où le traumatisme des vétérans est évoqué ouvertement (Rick étant de loin le plus traumatisé, on apprend aussi que Terry est en proie à des cauchemars récurrents). Ce même sujet de la guerre du Vietnam amène également l'épisode le plus sombre de la série où Magnum exécute de sang-froid un ancien conseiller militaire soviétique (double épisode Avez-vous vu le soleil se lever ? Saison 3 épisodes 1 et 2). Au cours de la série, les spectateurs apprennent également que Magnum a été marié à Michelle, une franco-vietnamienne qu'il a rencontrée lors de la guerre, ce qui sera le point de départ d'une longue intrigue disséminée au cours des huit saisons et qui clôturera par ailleurs la série.

Au cours de la série, il arrive également que le détective privé perde son autodérision au profit d'un ton plus grave ( par exemple lorsqu'il se retrouve face au serial killer de l'épisode contes et comptines). Beaucoup plus typiques des années 80, ces épisodes sont clairement ceux qui ont le plus mal vieilli.

A noter que la série était sensée s'achever à l'issue de la septième saison avec la mort de Magnum (Du côté de chez Mac) mais suite aux protextations des fans une huitième et ultime saison a été tournée.

A final, Magnum a résisté plus qu'honorablement aux outrages du temps et tous ceux qui ont aimé la série il y a vingt ans peuvent se ruer sur le coffret DVD disponible à un prix très raisonnable. Quant aux plus jeunes, nul doute qu'ils préfèreront piocher dans la liste longue comme le bras des séries plus modernes. Enfin, impossible de ne pas citer l'excellent générique qui contribua très certainement au succès de la série.