The Coffin
Le 12/05/2008 à 08:05Par Elodie Leroy
Si le cinéma thaï semble avoir été oublié dans les différentes sélections proposées par le Festival de Cannes 2008 - tout juste un film anglo-thaï (Soi Cowboy) dans la sélection Un Certain Regard -, il sera bel et bien présent au Marché du Film. Ce dernier projettera en effet en première mondiale le film fantastique The Coffin, de Ekachai Uekrongtham. Après Beautiful Boxer et Pleasure Factory, le cinéaste change de registre avec cette production pan-asiatique abordant une spécificité culturelle bien particulière de la Thaïlande, à savoir un étrange et sinistre rituel appelé « Non Loeng Sadorcro ».
Littéralement, « Non Loeng Sadorcro » signifie « s'allonger dans le cercueil, se débarrasser du mauvais sort », et il s'agit de pratiquer un rituel funéraire sur des personnes vivantes. Soupçonnées d'être porteuses d'un mauvais karma, ces dernières, qui sollicitent elles-mêmes cette pratique, doivent s'étendre dans un cercueil tandis que des moines bouddhistes entonnent des chants habituellement réservés aux morts. Enfin, les moines achèvent la cérémonie par un autre chant censé annoncer une vie nouvelle. Ceux qui ont pratiqué le rituel sont ainsi supposés renaître, libérés qu'ils sont du mauvais karma ou de la malédiction qui pesait sur eux. Avec le respect que l'on doit à toute pratique propre à une culture, on ne s'étonne pas qu'un tel rituel puisse donner lieu à des films d'épouvante. D'ailleurs, selon le ThaiFilmJournal, le réalisateur Ekachai Uekrongtham lui-même confiait à la presse thaï qu'il trouvait cette pratique « à la fois effrayante et fascinante ». Dans The Coffin, un jeune homme décide justement de subir le Non Loeng Sadorcro à la demande de sa petite amie. Mais les choses ne se déroulent pas comme prévu. Non seulement l'homme doit affronter sa claustrophobie, mais le couple est victime peu de temps après de phénomènes surnaturels et inquiétants...
Coproduction entre la Thaïlande (Live Inc. et NGR), Hong Kong (Hong Kong Global Entertainment) et Singapour (Scorpio East Pictures), The Coffin a aussi reçu le soutien financier du Hubert Bals Fund du Festival International de Rotterdam. En plus d'expliquer la présence d'un casting international, ces financements provenant de différents horizons constituent un phénomène de plus en plus courant en Asie. Ils permettent notamment aux petites industries de mettre en place des projets plus ambitieux qu'à l'accoutumée et de multiplier les lieux de tournage. Ainsi, The Coffin a été tourné à Bangkok mais aussi dans cinq autres provinces de la Thaïlande. Les sites incluent d'ailleurs un temple thaïlandais vieux de cent ans, des cimetières locaux et des chambres crématoires toujours actives actuellement. L'interprète principal de The Coffin est thaïlandais puisqu'il s'agit de Ananda Everingham, valeur montante très prolifique ces temps-ci, alternant entre les films grand public et les films d'auteur. On le découvrait il y a quelques années dans le film d'horreur Shutter et on pouvait le voir encore tout récemment dans le superbe Ploy de Pen-Ek Ratanaruang (le barman sexy batifolant avec la femme de chambre, c'était lui). Sa petite amie est campée par Karen Mok (Fallen Angels, Black Mask), un peu absente du grand écran ces dernières années malgré quelques caméos (dans Shaolin Soccer, notamment). On retrouvera aussi le Taiwanais Andrew Lin, membre actif de la bande Alive Not Dead vu récemment (et logiquement) dans Heavenly Kings, et la thaïlandaise Napakpapha Nakprasitte (Art of the Devil 2 et 3).
Reste à espérer que le réalisateur saura exploiter la matière fournie par un tel sujet sans tomber dans la banalité. Le cinéma d'horreur thaï a en effet démontré sa capacité à engendrer aussi bien des joyaux (Nang Nak, Le Pensionnat) que des productions insipides à deux sous (Ghost of Mae Nak). Wait and see.