Au Revoir à jamais
Le 27/01/2011 à 14:42Par Arnaud Mangin
C'est culte, c'est carré, c'est bourrin, c'est Renny Harlin et ça impose le respect. Au revoir à Jamais fait partie de la poignée de films d'action des années 90 qui ont survécu à l'épreuve du temps et sa redécouverte est indispensable !
Découvrez ci-dessous la critique de Au Revoir à Jamais
Critique Au Revoir à Jamais
Renny Harlin, c'est un peu le réalisateur bien dans ses baskets par excellence, mais surtout un vrai yes-man droit dans ses pompes. Terme loin d'être péjoratif en ce qui le concerne d'ailleurs. Si le bonhomme peine régulièrement à sortir de ses carcans en essayant de varier les genres, tout en restant dans le même registre (le bis de luxe) avec des films qui se suivent et se ressemblent, il livre pour la plupart du temps des produits calibrés avec sincérité et probablement avec naïveté. C'est cadré proprement, c'est lisse, c'est beau, c'est carré à tel point qu'on jurerait voir les story-boards à l'écran, mais ça conserve un certain charme lorsque le gentil Finlandais se retrouve illuminé par un éclair de génie. Bon, jusqu'ici, ce n'est vraiment arrivé qu'une seule et unique fois, mais pour le coup, le bougre a su créer la surprise. Plus bluffant encore, de toutes ses grosses machines, c'est Au revoir à jamais, plus banal tu meurs sur le papier, qui prend le moins de rides.
Les dés étaient jetés et ce n'était vraiment pas gagné. D'abord parce qu'Au Revoir à jamais avait tous les ingrédients pour basculer dans l'oubli et finir au fond d'un vidéoclub de quartier. Chose devenue un peu vraie d'ailleurs tant la popularité de ce film pourtant très grand public flirte désormais un peu avec le zéro, excepté dans le cœur des fans ou des férus de cinéma burné. Pourtant, Au-revoir à jamais reste noyé dans la masse des incalculables produits post-Die Hard, en plus d'avoir écopé d'une sortie salles en France dans la plus totale discrétion, dans une période peu propice.
Et quand on parle de Die Hard, c'est en signant le second opus que le bonhomme pensait avoir fixé ses limites. Un 58 minutes pour vivre plutôt sympathique, mais qui lâche en cours de route tout le cynisme et l'énergie du premier film signé McTiernan au profit d'un déferlement pyrotechnique qui a perdu toutes ses épices. Bruce Willis bondit sur l'aile d'un 747 avant de quitter le sol, et fait plein d'autres cabrioles du même type. Ce qui a, il faut l'admettre, de la gueule mais ne va guère plus loin. Même topo pour le méga succès Cliffhanger qui s'achève en eau de boudin, après plus d'une heure de spectacle vraiment bien foutu, en faisant éclater la maquette pourrie d'un hélicoptère de 12 centimètres. Harlin fait donc bien, mais Harlin fait surtout ce qui est à la mode. Pas de bol, ça se démode. On y croit sans trop y croire, avant de ne plus y croire du tout avec L'île aux pirates qui sert surtout à filer un coup de pouce à son épouse du moment, Geena Davis. Ça cafouille pas mal, pour ne pas dire que le film est assez nul, et au niveau des chiffres on se croûte en beauté...
Allez savoir pourquoi, l'ami Renny (contre les aigreurs ?) persiste, et signe avec Au revoir à jamais, un remake non officiel de son film précédent. Toujours pour pimenter la vie privée du couple - ça fait cher le fantasme de la tireuse d'élite - c'est encore madame qui joue les Rambo. Au box-office, on tourne donc toujours à vide, mais le film s'impose enfin comme un défouloir vraiment maîtrisé. Le fait de ne pas viser trop haut en termes de franchise et de têtes d'affiche joue artistiquement en la faveur du cinéaste, dont on n'attend alors plus grand-chose. Le charme opère. Et pas nécessairement grâce à Geena Davis qui, bien que très mimi, finit d'ailleurs par flirter avec la vulgarité grasse dans une métamorphose à peine plus réussie qu'un travelo maquillé comme un camion volé. Non, si c'est charmant, c'est peut-être parce que le film assume ses 10 ans de retard sur la période Stallone/Schwarzenegger et s'enfonce dans une ambiance nostalgique des années précédentes en échappant de peu au syndrome Matrix. Ils ne sont pas nombreux, les films d'action de série B qui ressemblent réellement à des blockbusters, alors profitons-en.
Ne signant qu'une réadaptation moderne et féminine du roman La Mémoire dans la peau (avant le film avec Matt Damon, mais après celui avec Richard Chamberlain), avec un peu de XIII, Harlin pêche par manque d'inspiration sur le fond mais trouve l'opportunité de se lâcher dans la forme. Pas originale pour deux sous, l'intrigue et toutes les scènes remuantes qui vont en découdre reposent essentiellement sur le fait que c'est ici une femme - mieux, une institutrice mère de famille gentille comme tout - qui va soudainement se transformer en machine à tuer en pétant les vertèbres d'une colonie entière de terroristes ou en faisant sauter des camions une fois qu'elle retrouve la mémoire. Au point de positionner Samuel L. Jackson en simple faire valoir masculin. On n'évitera certes plus le sempiternel refrain comploteur "C'était la meilleure, mais on doit l'éliminer", mais tout le monde se décarcasse pour offrir l'actioner le plus énergique possible avec une vraie jubilation. Geena Davis la première, qui se la donne grave.
Quinze ans plus tard, on se marre toujours autant devant le film, mais jamais à ses dépends, en cherchant sans doute encore les petits tics propres au cinéaste disséminés ici et là (le bonhomme a eu sa période "neige") ou en admirant une pléiade de seconds couteaux qu'on retrouve comme des vieux copains (David Morse, Brian Cox, ou Craig Bierko qu'on croyait disparu jusqu'à Scary Movie 4). Les plus pervers d'entre nous pourront même fureter sur IMDB pour voir à quoi ressemble aujourd'hui la petite Yvonne Zima, 7 ans à l'époque, qui criait "maman" toute les dix minutes avec son regard de cocker... Comme on sait que vous y avez été, vous serez d'accord avec nous : ça fait plaisir aux mirettes, comme le film d'ailleurs, et rien que pour ça on va remercier Renny. De votre part, on lui fait un gros bisou, et bonne nuit !