La Proie
Le 11/04/2011 à 16:38Par Arnaud Mangin
La Proie est un thriller lorgnant souvent vers l'action rempli d'intentions louables, la principale étant de proposer un spectacle généreux et populaire. Malheureusement, non seulement le scénario n'est pas à la hauteur et le rythme pas toujours au rendez-vous, mais La Proie souffre énormément de la comparaison avec le récent et très réussi A Bout Portant. Une tentative en rien honteuse, mais qui s'avère rapidement oubliable... Découvrez ci-dessous la critique du film La Proie.
CRITIQUE : LA PROIE
Pour une simple question de principe, La Proie est un film qu'il faut vivement encourager et soutenir pour sa démarche noble : s'insérer dans la brèche (qui peine à s'entrouvrir) dans le paysage du cinéma de genre français, et donc appuyer le retour vers les polars efficaces des années 70, une époque moins frileuse. Eric Valette, passé par monts et par vaux depuis le début de sa carrière, de ce côté de l'Atlantique comme de l'autre, pose ici simplement les pions essentiels sur l'échiquier du thriller et va dans le sens d'un vrai film populaire en respectant les codes du genre. Un gentil, un méchant, des valeurs nobles, une situation inextricable et pratiquement aucune chance de la résoudre. Un peu Melvillien sur les bords, son héros - Frank - est un ancien braqueur mis derrière les barreaux, et qui se met les teigneux de service à dos après être venu au secours de son codétenu, Jean-Louis. Bien mal lui en a pris puisque le souffre-douleur en question est en réalité un dangereux tueur en série qui, une fois dehors, compte s'amuser à mettre tous ses crimes sur le dos de Franck, avant de s'en prendre à sa famille. Le taulard n'a alors d'autre choix que s'évader pour capturer le monstre, avant d'être lui-même pris en chasse par toutes les forces de polices françaises. Et la police française, c'est Alice Taglioni qui se la joue Tommy Lee Jones dans Le Fugitif. Ajoutons à cela des courses-poursuites à n'en plus finir, des carambolages, des fusillades échappées de chez Luc Besson et une belle séquence sur le toit d'un train façon Mission Impossible pour couronner le tout. Il y a de quoi se frotter les mains...
Comme nous le disions plus haut, La Proie se doit d'être défendu par principe mais, malgré l'effort fourni, se confronte à un constat pas si évident dans la pratique. Tous les ingrédients sont là pour faire du film d'Eric Valette un thriller haut en couleurs, mais le dosage ne s'avère pas toujours maîtrisé. En premier lieu, La Proie a la malchance de sortir après A Bout Portant de Fred Cavayé, devant lequel il ne tient pas la comparaison alors que les deux films jouent dans la même cour. Le constat n'est guère avantageux puisque l'on se surprend régulièrement à se dire "Ça, c'était mieux emballé dans A bout portant" ou "C'était plus réussi dans Ne le dis à personne", deux films auxquels La Proie emprunte de nombreuses péripéties imposées, dans les limites budgétaires hexagonales. Les types qui cavalent sur le périphérique ou dans les transports en commun, qui sautent par la fenêtre et tutti-quanti, on en a vu pas mal - surtout chez nous - et souvent en bien mieux. Ensuite, La Proie ne se rattrape pas très bien sur le reste. Le scénario part dans beaucoup trop de directions avec des personnages sans intérêt, et souffre d'une pelleté de ventres mous (au point de paraître très long), là où A Bout portant (oui, encore lui !) imposait un tempo effréné assurant le spectacle sans difficulté.
Constater l'effort fourni et l'évidente envie de cinéma coule de source tant il se dégage de La Proie une sincérité et un amour du genre indiscutable. Mais la balance a parfois du mal à trouver son équilibre, entre l'envie de saluer la sempiternelle "tentative française" (qui commence à tenter depuis un bon moment déjà) et celle de trouver un véritable plaisir de spectateur, franchement relatif ici. Outre des dialogues qui manquent de caractère, des acteurs pas toujours exceptionnels, une énergie en dent de scie et un méchant tueur qui fait même pas peur (qui fait parfois rire même), on ne sort pas de la séance avec la sensation de s'être précisément éclaté ou d'avoir été pris aux tripes ; alors que c'est quand même l'intérêt de ce type de produit. On se répète donc une ultime fois, parce que ça nous saute quand même au visage avec une évidence folle : dans le genre, A Bout Portant est nettement mieux !
Date de première publication : 2 mars 2011 à 13h05