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Interview A bout Portant : Gilles Lellouche

Le 02/12/2010 à 14:00
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Interview de Gilles Lellouche pour le film A Bout portant

Présent sur de nombreux projets aussi variés qu'audacieux, Gilles Lellouche est à l'affiche d'A bout portant, un thriller d'action où il doit faire équipe avec un criminel pour sauver la vie de sa femme. A cette occasion nous l'avons rencontré et évoqué avec ce dernier l'importance de proposer des films de ce genre en France ainsi que l'éreintante performance physique exigée par son rôle.

 

Filmsactu : Quelle était votre réaction en recevant un scénario comme celui d'A bout portant ?

Gilles Lellouche : J'ai été extrêmement content, parce que c'est exactement le genre de projet auquel tout acteur rêve de participer. Ca fait longtemps que j'avais envie de faire un film comme ça et de m'atteler à un personnage typiquement cinématographique, un type ordinaire qui se retrouve propulsé dans un univers qui n'est pas le sien. Un univers de violence, de gangsters et de flics corrompus qui l'oblige à se comporter comme un héros. C'est très valorisant pour un comédien parce qu'on a tous envie d'incarner un héros à un moment ou un autre. En plus le scénario est extrêmement efficace et je l'ai dévoré d'une traite. Et à côté de ça, il y a l'aspect professionnel qui ressort et à la lecture : j'ai compris les nombreuses difficultés physiques que j'allais rencontrer et que ça allait demander d'énormes efforts.

 

Et comment vous êtes-vous préparé à cette performance physique ?

En faisant appel à un coach qui m'a fait courir deux heures par jour pendant trois mois ! Mais c'était essentiel de passer par cette étape car si j'étais passé outre, mon corps n'aurait pas pu suivre. Il y a une longue poursuite dans le métro d'une durée d'environ huit minutes, qui a nécessité deux semaines de tournage. Nous avons recommencé inlassablement beaucoup de plans où je suis en train de sprinter. Si on n'habitue pas son corps à ce genre de performance, on déclare forfait au bout de deux jours.

 

Interview de Gilles Lellouche pour le film A Bout portant

 

Une scène qui rappelle le cinéma de Belmondo. Fred Cavayé vous a-t-il demandé de "faire du Belmondo" ?

Non, ce n'était pas vraiment l'idée mais pour la crédibilité du film, j'ai tenu à faire mes cascades moi-même. J'ai pu imaginer facilement la manière dont Fred allait s'y prendre pour réaliser son film et il est devenu évident que si j'avais fait appel à une doublure ça se serait vu comme le nez au milieu de la figure pendant tout le film. Ca n'aurait pas fonctionné. Et Fred avait envie d'aller vers les gros plans et proposer quelque chose d'immersif à l'écran. Que j'ai assuré moi-même la grande majorité des cascades, c'est peut-être la seule chose qui peut m'honorer d'être comparé à Belmondo. Mais c'est une autre époque, un autre film, une autre façon de faire.

 

Cette envie, pour un acteur français, de participer à un tel projet n'est-elle pas symptomatique de l'état de notre cinéma en ce moment ? A savoir que les films d'action sont mal reçus par les professionnels, ont du mal à exister et sont donc très rares.

On n'a jamais l'occasion de faire des choses comme ça en France parce qu'on a un balai dans le cul ! C'est bien vu d'aller regarder un film comme ça lorsqu'il est fait par nos amis américains, mais lorsque quelqu'un chez nous s'y frotte, on crie au scandale. Sauf que dans le cas présent, le film est réussi ! Je suis personnellement très fier de le présenter à cette profession qui n'ose pas faire ce genre de chose. Il faut qu'on se décomplexe absolument. Il y a une époque où le polar n'avait plus le droit de citer en France et grâce à des gens comme Olivier Marchal ou Guillaume Canet, ça revient enfin de façon noble. Il y a des gens qui ont beaucoup de talent mais qui sont bloqués dans des cases parce que leur approche ne correspond pas à une certaine norme. J'espère sincèrement que A bout portant rencontre un vrai succès, parce que ça permettrait peut-être à certains jeunes réalisateurs de faire ce qu'on leur a refusé.

 

Interview de Gilles Lellouche pour le film A Bout portant

 

Et du point du vue du comédien, c'est un engagement important d'apporter cette contribution à ce genre de cinéma encore trop en retrait ?

Le cinéma français vit une époque primordiale aujourd'hui parce qu'il se compose de plus en plus de réalisateurs qui n'ont pas forcément envie de rester sur les lauriers. Pour nous, les comédiens, quand on a la chance d'avoir le choix et une certaine responsabilité parce que c'est désormais notre tour, il est important de savoir ce qu'on va en faire. Qu'est ce qu'on en fait de cette chance ? Je deviens pantouflard et je ne fais que les films que je sais faire, pour être sur de ne pas me planter ? Ou bien je prends des risques et j'essaie de m'orienter vers des genres qui sont rares ? Ca ne m'empêche pas de faire des films d'auteurs parce qu'il en existe encore de très bon et on peut être fiers, en France, de voir que Des Hommes et des dieux rencontre un vrais succès. Mais on a également une série de comédies que je trouve franchement balourdes, faites avec les pieds et réalisées de façon mercenaire : on rentre dans la banque, on prend l'argent et on se casse ! C'est surtout cet aspect là de l'industrie française qui, selon moi, n'est pas du cinéma. Je me fais une haute estime du cinéma et je me sens beaucoup plus proche d'un Vincent Cassel, d'un Romain Duris ou d'un Jean Dujardin qui savent prendre des risque et ne se cloitrent pas une seule catégorie.

 

Il suffit de donner sa chance à un cinéma fort, encore trop étouffé...

Tout à fait. On a un réalisateur comme Romain Gavras qui a réalisé Notre jour viendra que personne n'a vu alors que le film est dément, avec de grande qualités esthétiques et d'humour. Il faut être culotté, il faut proposer des choses et il faut surtout aller de l'avant. Ce n'est pas normal que des séries TV américaines nous foutent des trempes. Ce n'est pas normal que la comédie américaine ait dix ans d'avance sur nous. Les anglais sont toujours très forts et novateurs et je pense qu'on a les moyens de l'être aussi. Il faut juste arrêter d'être pantouflard.

 

Interview de Gilles Lellouche pour le film A Bout portant

 

Avec Narco, vous avez réalisé un film qui sortait des sentiers battus, original et soigné esthétiquement. Vous avez donc contribué à ce combat. Comptez-vous repasser derrière la caméra ?

C'est vrai que depuis Narco j'ai un peu fait la sieste... Disons que depuis, j'ai eu la chance d'avoir une carrière d'acteur qui n'a fait qu'augmenter, mais ça ne laisse plus du tout le temps d'écrire. C'est difficile d'enchainer trois films et, entre chaque, écrire un scénario. J'ai déjà plein de notes dans tous les sens et 80 pages pour chaque projet que j'ai en tête, mais j'ai surtout besoin de m'y impliquer pleinement. Pour ça, il faut être loin de Paris et des sollicitations que ça amène, mais c'est quelque chose que j'envisage de faire sérieusement à partir du mois de décembre. J'ai deux projets. Le premier est une sorte d'Ocean's Eleven dépressif et l'autre serait une comédie romantique ultra-violente. Ils n'ont rien à voir l'un avec l'autre, mais ils me tiennent très à cœur...





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