Tout arrive ! On se demande encore pourquoi, l'année dernière, Universal s'est fourvoyé dans un micmac technique qui n'a fait que le desservir, de polémiques en manœuvres commerciales, quand on sait (et qu'on constate surtout) qu'il existait bel et bien une copie du film digne de ce nom. En l'occurrence celle qui est désormais disponible dans nos bacs depuis quelques semaines. Dès le lancement du film, la satisfaction engendrée par la qualité d'image est au moins aussi importante que ne l'était la déception sur la précédente édition (tout est expliqué dans notre test du Blu-Ray Gladiator de 2009) : les nuances sont flagrantes dès la simple apparition des logos Universal et Dreamworks, ainsi que les cartons d'introduction, totalement limpides ici, alors qu'ils avaient l'aspect d'un upscalling grossier sur la précédente copie. Une constatation qui se confirme à travers toutes les séquences qui suivront, puisque les premières minutes de Gladiator reposent essentiellement sur des plans larges, nocturnes, forestiers et bourrés de détails, enfin d'une beauté et d'un piqué splendide... On oublie très vite la définition fouillie et le massacre du DNR qui rendait illisible la bataille de Germanie sur l'ancien disque et surtout invisible sa pluie de flèches. Le reste du film est, à une poignée de plans près manquant un peu de peps, du même acabit et l'on apprécie enfin la splendeur des nombreux plans larges et des décors qui les accompagnent. Les nombreux combats dans le Colisée peuvent tous se targuer d'une image fouillée qui va jusqu'à permettre de distinguer précisément les spectateurs apparaissant dans les gradins. Universal a entendu le mécontentement des consommateurs et a rectifié le tir avec brio.
Retrouvez nos captures Blu-Ray en Full HD (1080p) :
Le spectacle est toujours aussi percutant sur le plan sonore. Tout du moins pour les amateurs de version originale puisque l'on écopera littéralement du minimum syndical en ce qui concerne la VF ou n'importe quelle autre langue, du moment qu'elles tiennent toutes sur la galette. Remplissage oblige, les amateurs de la langue de Molière devront se contenter d'un ''petit'' DTS mi-débit qui avait déjà fait ses preuves sur DVD. Le mixage solide suit timidement mais honorablement le chemin tracé par la VO. Et quelle VO ! Mettant tout ses œufs dans un seul panier, Universal propose pour l'occasion un DTS HD Master audio mastodonte, faisant résonner les graves comme autant d'uppercuts (et ce pendant quasiment tout le film !) et laissant finalement toutes les autres pistes du disque à la traîne derrière lui. L'enveloppement s'impose avec une force régulièrement surprenante, amplifiant tout autant les nombreux effets de foule que la splendide musique de Hans Zimmer.
Côté bonus, c'est du lourd ! Du très lourd, même, puisque Universal a casé la totalité des suppléments existant à ce jour sur le film, que ce soit en édition simple ou en rééditions super collector, au point de nécessiter un second disque. Il n'en fallait d'ailleurs pas moins pour rendre hommage au travail titanesque réalisé sur le film et l'on se retrouve ici devant de très longues heures d'exploration. Il va falloir s'armer de patience puisque l'on compte, à vue de nez, près de 5h30 de commentaires audio et pas moins de quelques 9h15 de documents vidéo, rien que sur le second disque ! On notera par ailleurs la disparition d'un module caché de l'édition collector qui évoquait sérieusement la préparation d'un Gladiator 2, avec des détails de l'histoire, visiblement plus beaucoup d'actualité. Voici le tour complet de cette incroyable interactivité :
Blu-Ray 1
Commençons par la seule nouveauté de l'apport Blu-Ray, la désormais traditionnelle fonction U-Control d'Universal qui donne accès à quelques fonctions durant la lecture du film et dans lequel l'éditeur a souvent excellé. Dans le cas présent, c'est un tout petit peu différent puisque cela consiste en un marqueur thématique, qui permet à votre lecteur Blu-ray de garder en mémoire le time code de vos séquences préférées, et lorsque vous insérez le second disque, celui des bonus, ils se dirigent ''automatiquement'' vers les coulisses des scènes que vous avez annotées au préalable.
Sur le papier, l'idée est sympa mais en pratique, c'est un cafouillage qui fera rapidement perdre patience l'utilisateur. Passer par plusieurs sous-menus, ne pas se mélanger les pinceaux avec une fonction directe sur le film (quelques notes écrites en anglais), pour finalement être obligé d'insérer le second disque quoi qu'il arrive nous renvoie vite à l'évidence : il veut mieux passer cette étape, insérer directement le disque des bonus et naviguer à travers celui-ci de façon classique. En effet, quelque soit notre recherche, le chapitrag efficace nous permettra de trouver rapidement notre bonheur.
Ensuite, selon la version du film que l'on sélectionne (la version ciné/director's cut de 2h35, ou la version longue de 2h50), les bonus diffèrent quelque peu. En choisissant la version cinéma, on a aura droit à un premier Commentaire audio de Ridley Scott, datant de la première édition du film en DVD, sur lequel il est accompagné de son monteur Pietro Scalia et de son directeur photo John Mathieson. Aussi complet que peut l'être l'intervention d'un cinéaste comme Scott, mais manquant un chouia de recul, puisqu'enregistré à la hâte avant la sortie du film, ce commentaire de Gladiator se montre parfois inégal mais d'une grande générosité. Pour avoir un peu plus de recul, mais en se risquant tout de même à de sacrées redites, il faudra choisir la version longue qui donne accès à un autre commentaire du cinéaste, cette fois-ci accompagné de son acteur principal Russell Crowe. On connaît Ridley Scott pour ses commentaires méticuleux, toujours axés sur la mise en scène, ses choix esthétiques, ses goûts, sa façon de narrer l'histoire. Des propos toujours passionnants mais qui peuvent sembler rébarbatifs à ceux qui espèrent un peu d'ambiance pour maintenir l'attention. Et c'est en partie le rôle ici de Russell Crowe qui rebondit sans cesse sur les propos de son ami en apportant ses propres anecdotes. Une excellente ambiance règne donc ici sans pour autant que ce commentaire ne devienne superficiel. Les remarques sur la mise en scène vont de pair avec les anecdotes, les réflexions sur le métier de réalisateur sont pleines de pertinence tout comme celle sur le métier d'acteur et la relation de travail entre les deux. Non seulement on ne s'ennuie pas une seule seconde à écouter les deux bonhommes, mais ils nous invitent inconsciemment à nous plonger dans leur monde l'espace de deux heures et demi. Et même si Ridley Scott n'a plus le monopole de la parole, ce commentaire arrive à nous donner une leçon de cinéma enrichissante.
Enfin, si l'on choisit de regarder la version longue, on retrouvera une brève introduction (33 secondes) où le réalisateur explique clairement que le montage de la version longue n'est absolument pas une director's cut, le montage diffusé en salles et présent sur les autres éditions remplissant déjà ce rôle.
Blu-Ray 2
La force et l'honneur : L'univers de Gladiator (3h17) :
Les éditions collector en étaient tellement à leurs balbutiements à la sortie de Gladiator en DVD début 2001 qu'on ne pouvait que saluer le produit final : deux disques bien fournis, un film techniquement au top, des scènes coupées à foison, une interview de Hans Zimmer, des photos et même un documentaire un peu cheap sur les gladiateurs, mais qui avait le mérite d'être là pour ceux qui souhaitaient en savoir plus tout de suite. Une sympathique interactivité que bien peu d'entre nous eurent la volonté de visiter une seconde fois, et dont nos souvenirs nous rappelaient presque la présence d'un vrai making of. Et pourtant il n'en était rien à l'exception d'une "petite" featurette HBO de 25 minutes qui ne survolait que trop vaguement le tournage de ce splendide film.
Le vrai making of, le voici et il dure huit fois plus longtemps que celui de l'édition précédente ! Il ne s'agit ni d'une version rallongée, ni d'une récupération de morceaux de making of promotionnel : ce monstrueux documentaire revisitant le tournage de Gladiator de bout en bout renvoie même dans les cordes l'édition collector des Dents de la mer... Un exploit en soi.
Qu'il s'agisse de l'étonnante mise en chantier du film avec un scénario encore incomplet adopté par Ridley Scott, qui n'était même pas à l'origine du projet, ou des idées oubliées et abandonnées, personne ne se taira dans ce making-of sur le dur labeur que fut la pré-production de Gladiator. On en retiendra d'ailleurs la grande déception du réalisateur d'avoir abandonné le combat contre le rhinocéros pour cause de budget. En effet, il était impossible de dresser l'animal pour le rendre furieux à l'écran sans sacrifier la moitié de l'équipe, et le reproduire entièrement en numérique aurait été là encore hors de prix. On retrouvera d'autres anecdotes de pré-production concernant la fin de tournage mais étrangement pas tant que cela d'anecdotes décrivant le tournage en lui-même, si ce n'est que l'entente entre Scott et ses producteurs ne furent pas des plus cordiales, fax orduriers à l'appui. On préfèrera s'attarder sur la confection des costumes, des décors et autres effets spéciaux en faisant intervenir les créateurs du film ainsi que des experts de la Rome antique pour mieux souligner la véracité de cette énorme reconstitution.
Au rang des étrangetés, on se penchera également sur le tournage des scènes finales d'Oliver Reed... alors que ce dernier était mort depuis quelques jours. Une perte humaine à peine compensée par le génie des infographistes qui ont été jusqu'à gommer une partie de sa barbe en numérique. Le tour de passe-passe à peine évoqué dans le commentaire de l'édition précédente est ici expliqué dans les moindres détails. On revient également sur le succès du film et ses récompenses aux Oscars, bien que Ridley Scott ait un peu de mal à saisir comment un film peut être considéré comme le meilleur de l'année, mais pas son réalisateur. Même si l'on regrettera que les images de tournages ne soient pas exploitées davantage, on ne pourra que saluer ce tour d'horizon, où Russell Crowe n'a étrangement pas jugé utile d'intervenir, mais qui dévoile toutes les ficelles du tournage. On n'en attendait pas moins de la part de l'équipe de la déjà épatante interactivité du coffret Alien.
Comme si ces trois heures et quart ne suffisaient pas, le Blu-Ray propose un Mode amélioré permettant d'obtenir quelques thèmes à rallonge évoqués dans ce long documentaire via quelques modules complémentaires. Disponibles à travers une liste chapitrée qu'il est possible de lire d'une traite, ou pendant la lecture du making of (pas la méthode la plus pratique), ces 64 modules composent un autre reportage d'1h59 ! Rien que ça... L'aspect featurette de la plupart d'entre eux empêche d'avoir une vue d'ensemble avec un vrai fond, même si dans l'absolu, le gros du discours se répète forcément avec le documentaire principal. En tout cas, les fans ne voulant perdre aucune miette de ce que les intervenants ont dit lors de leurs interviews se régaleront !
Quand y'en n'a plus, y'en a encore !
Malgré le tour complet offert par le long making of et sa rallonge de deux heures, d'autres modules remplissent à ras bord ce second disque. Un premier menu, L'image et Design, s'intéresse d'abord à La conception des décors (9min35), une courte mais suffisante intervention du chef décorateur qui revient sur ses diverses inspirations pour donner vie à l'univers visuel de Gladiator, croquis, dessins et peintures d'époques à l'appui. Des images que l'on pourra ensuite retrouver dans une très riche galerie interactive. Le story-boarding (13min37) donne la parole au talentueux Sylvain Despretz, dessinateur français à qui l'on doit également le story-board de La chute du faucon noir. Il revient sur son approche du dessin, ses méthodes de travail, sa façon de mettre en avant la photographie des scènes en complicité avec Ridley Scott. Nous aurons ensuite droit à 3 comparatifs film/story-board (env. 15min) ainsi qu'une importante galerie des planches en question. Une dernière interview s'intéresse à l'Abécédaire des armes (5min03) en donnant la parole à un accessoiriste qui révèle la vraie nature des dangereux objets utilisés dans le film. Cette première section s'achève sur deux autres type de galeries : Les costumes tout d'abord, une galerie composée de croquis et photos diverses éparpillées dans 6 sous-catégories propres aux personnages principaux du film, et les photos de tournage qui dédiée essentiellement à l'univers romain.
Un autre menu se focalise sur les Séquences abandonnées et scènes coupées. Dans l'absolu, nous n'y retrouverons pas toutes les scènes coupées d'origine puisque la grande majorité d'entre elles ont été réintégrées dans la version longue. On pourra néanmoins jeter un oeil sur La deuxième version du générique (1min55) entièrement conçue sur une table de bronze, sans aucun apport numérique mais malheureusement supprimée du montage final car trop longue. C'est sur la passionnante Interview de son créateur (7min25) que nous découvrirons la conception de cette dernière. Ensuite, Une vision sanguinaire permet via un story-board et des rushes de deviner ce qui aurait pu être un étrange délire hallucinatoire où, à la mort de sa famille, Maximus aurait eu tout autour de lui un cercle de sang numérique. Même si le sujet est déjà longuement abordé dans le long documentaire principal, on revient ici sur une séquence story-bordée évoquant un affrontement contre un rhinocéros. Autre séquence, très courte cette fois-ci, Le Choix des armes dévoile les premières grandes lignes de la stratégie de Maximus pour le combat en Afrique du nord. Enfin, une dernière vidéo appelée Coffre au trésor (7min12) est un petit montage de plans non conservés avec le thème du film en guise de fond musical...
Sans en avoir l'air, les dernières heures de bonus se cachent dans le menu Archives Auréliennes qui propose tous les bonus de la toute première édition du film, auxquels on a rajouté le module L'exploration des effets visuels (23min51), un peu redondant avec le chapitre dédié aux effets numériques du making of principal. Ce sont ici les infographistes eux-mêmes qui nous expliquent leurs différentes démarches pour donner vie aux nombreux plans impossibles du film. On y trouvera donc le Making Of HBO (25min) qu'il vaut mieux effectivement considérer comme une archive d'époque que comme un élément informatif, surtout comparé à ce qu'on a vu plus tôt. Dans le genre ''à la mode" et "efficace remplissage'', les reportages thématiques avec des reconstitutions foireuses étaient légion au lancement du DVD. C'est le cas de Les Jeux des gladiateurs (50min), module télévisé réalisé à l'époque de la sortie du film en salles, une promo vite torchée qui essaye de se montrer pédagogique. Dispensable. A cela se joint un module consacré à Hans Zimmer (20min) mettant en avant son travail sur la bande originale du film, ainsi que le Carnet de bord de Spencer Treat Clark, tentative louable mais pas très intéressante de livrer l'aventure Gladiator du point de vue (manuscrit) de son plus jeune comédien. Outre une longue liste de bandes annonces et spot TV consacrés au film (13min en tout) on appréciera deux modules focalisés sur l'acteur principal, Russell Crowe entre les prises (8 min) et Une soirée avec Russell Crowe (27min15), qui le dévoilent sous un jour très déconneur. Le premier est un bêtisier où il semble bien décidé à saboter le travail des techniciens venus tournés le documentaire sur les gladiateurs, tandis que le second est une séance de questions et réponses assez chouette avec son public lors d'une avant-première.
La Starbox avant l'heure ?
Une interactivité particulièrement hallucinante sur le plan quantitatif et qui demandera un temps fou à ceux qui voudront l'explorer de fond en comble.
Critique Interactivité : Kevin Prin et Arnaud Mangin