Source Code

Duncan Jones a effectivement tout pour être en odeur de sainteté dans le cœur des cinéphiles qui ne demandent qu'à passer un bon moment. Après un Moon particulièrement remarquable, le jeune réalisateur transforme l'essai en se laissant prendre dans les méandres du blockbuster à l'américaine, tout en parvenant à le dompter. Avec un budget beaucoup plus important que son précédent long, il ne relève pas un, mais deux paris ! Tout d'abord fournir ce que l'on peut attendre d'un tel programme, à savoir action, suspense, concept narratif prenant au tripes et ce qu'il faut d'esbrouffe visuelle pour nous en mettre plein les yeux ; le tout au service d'une intrigue basique mais ludique, se basant sur l'histoire d'un homme capable de remonter incessamment le temps (il voyage plutôt dans des réalités parallèles via des failles télépathiques) pour empêcher une bombe d'exploser à bord d'un train et retrouver le coupable. Une sorte d'hybride entre 24 heures chrono et Un jour sans fin qui nous renvoie du côté de Déjà-vu et surtout de L'Armée des 12 singes sur bien des aspects.

C'est d'ailleurs vers cette dernière référence que lorgne la seconde réussite du film, bien plus marquante puisque comme on s'y attendait, le véritable cœur du propos ne repose pas dans l'aspect purement "thriller" du spectacle. En effet, en faisant marcher Source Code dans les pas de Moon, dont il peut presque être considéré comme un remake ou une déclinaison, Jones n'attend pas la chute de son film pour lever le voile sur les mystères narratifs de son intrigue, mais distille son empathie pour son héros. Parce que dans Source Code, le personnage prend le dessus sur l'histoire. Décalant l'emprisonnement industriel de son précédent film vers la toute puissance militaire ici, il y aborde toujours les mêmes thèmes, qui sont le sacrifice et l'isolement de l'individu (dans son esprit comme dans sa chair) dans l'intérêt du système, la manipulation psychologique (dans un but de déshumanisation), les bourriques qu'on fait tourner à répétition et surtout, cette espèce de miroir aux alouettes que les grands s'évertuent à agiter sans scrupule devant les petits pour les faire marcher au pas. Le retour de l'homme au simple état de rouage relié au monde par des écrans dysfonctionnels. Rouage qui, tout comme dans Moon, finira par se retourner contre le mécanisme...

On ne peut donc pas insinuer que Source Code soit un Moon +1 puisqu'il n'est pas aussi sensationnel que ce dernier. Mais il se dégage un parfum plutôt familier, nourri de la même légèreté, du même optimisme, avec ce qu'il faut de rêve pour sortir de là avec une satisfaction bien réelle. On constate que le spectacle tout public n'est pas forcément synonyme d'abrutissement (on peut voir le film comme un mini-Inception) et qu'il y a encore des réalisateurs qui ne s'affranchissent pas de leur talent ou de leur regard lorsqu'ils mettent le doigt dans l'engrenage. Même l'angle romantique est tout aussi maitrisé que le reste. De la science-fiction qui plaît !

Critique de Source Code publiée le 16 mars 2011 à 14h25.