Cinéman
Le 28/10/2009 à 19:04Par Michèle Bori
Malgré son pitch génial, Cinéman n'est qu'un long sketch pas drôle qui n'arrive jamais à se montrer à la hauteur de son postulat de départ. Le réalisateur et scénariste a semble-t-il été dépassé par un sujet un peu trop vaste et ambitieux pour lui (s'il est un écrivain reconnu, ce n'est que son deuxième film) et il en résulte un produit totalement ringard, pas drôle du tout et aussi intéressant qu'une pub pour la Fête du Cinéma étalée sur une heure et demie. Yann Moix rêvait d'envoyer une lettre d'amour ouverte à l'Art qui le fait vibrer depuis qu'il est enfant : raté, son Cinéman est au final plus grossier et insultant qu'autre chose. Un film écrit par un enfant de 11 ans. Et ca se voit !
Découvrez ci-dessous la critique de Cinéman
En cinéma comme ailleurs, il y a des signes qui ne trompent pas. Des signes avant-coureurs qui laissent peu de place au doute. Généralement, lorsqu'un film supposé sortir en Juillet 2008 arrive finalement sur les écrans en Octobre 2009, on a toutes les raisons de penser qu'il y a un problème quelque part. Certes, l'histoire a prouvé à maintes reprises que des post-productions chaotiques pouvaient aussi laisser présager de chefs d'œuvres mais lorsqu'en plus se rajoute qu'à trois semaines d'une sortie, l'unique projection de presse de ce même film est réservée à une poignée de journalistes triés sur le volet, laissant de côté une grande majorité de la presse papier et surtout internet, là, on se dit qu'on tient sûrement un prétendant au podium des flops de l'année de Filmsactu. Ce n'est pas un apriori, c'est juste de l'intuition... ou de l'expérience diront certains. Fort de ces signes et de cette "expérience", on l'avoue, cela faisait déjà quelque temps qu'on sentait que Cinéman était plus proche des Gérard que des Césars. Ce matin, patatra, le verdict est tombé. Bigre, nous étions loin du compte, le nouveau film de Yann Moix est encore pire que ce à quoi nous nous étions préparé.
Franck Dubosc incarne donc un professeur de mathématique, ringard, beauf, bavard et vulgaire avec les femmes (bref, un personnage à la Dubosc), qui, grâce à un coup de pouce du destin et un sacré raccourci scénaristique, se retrouve capable de voyager "dans le cinéma". Le voilà donc à incarner Robin des bois (façon Dujardin dans OSS 117 2), Tarzan (ou plutôt Tarzoon, la honte de la jungle), Zorro, Travis Bickle (oui oui, Duboscq dans Taxi Driver, vous avez bien lu) ou encore Blondin, naviguant dans des reconstitutions de célèbres longs-métrages ayant marqué le cinéma, avec pour but de sauver la belle Vivianne Cook des griffes du méchant Douglas Craps. Un pitch original, emballant même, qui nous laissait fantasmer d'un Last Action Hero (véritable maitre-étalon contemporain dans la mise en abyme de son art) "à la française". Seulement voilà, Yann Moix n'est pas Shane Black, et encore moins John McTiernan, c'est le moins qu'on puisse dire. Et son Cinéman tient pour l'instant, et de très loin, la palme du plus gros nanar de l'année.
Pas vraiment une surprise mais une semi déception tout de même, puisqu'on se dit qu'avec un bon scénariste au stylo (pourquoi donc pensons-nous à Christophe Turpin ?) et un réalisateur inspiré derrière la caméra (on en a quand même quelques-uns en France), nous aurions pu tenir là un excellent divertissement, un roller-coaster pelliculé qui saurait faire sourire le héros de cinéma caché dans nos cœurs de cinéphiles. Nous pourrions faire le détail de tous les défauts et les incohérences du script, succession de saynètes sans véritable lien, ni suspense, ni rythme, ni montée en puissance, ni intrigues secondaires. Nous pourrions nous gausser de la postsynchronisation plus que ratée des dialogues (on se croirait dans une telenovela) ... en même temps, lorsqu'on sait que Moix dit qu'il trouve ces nouveaux dialogues "deux fois meilleurs" que les précédents, on n'a pas envie de découvrir les originaux. Nous pourrions également juger de la mise en image kitch et cheap du "monde réel" (qui se voit transformé en boite de nuit géante, plein de lumières improbables et flashy), du sur-jeu des comédiens (apparemment c'est voulu) et du manque de fun global de l'ensemble, mais ce serait du lynchage. On préférera dire que Cinéman a été écrit par un enfant de 11 ans (Moix se vente d'avoir fait le premier story-board du film en 1979) et que ca se voit. Allez, quand même, les effets spéciaux sont réussis, c'est déjà ça.